Intervention de Marie-Andrée Seguin

Réunion du 22 mars 2016 à 17h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Marie-Andrée Seguin, secrétaire nationale chargée de la politique en matière d'égalité professionnelle et de la condition féminine de la CFDT :

Madame la présidente, je me réjouis de la volonté d'oeuvrer pour la pérennité des instances que vous venez de citer, au travers desquelles nous pouvons défendre l'égalité professionnelle réelle.

Le projet de loi dont nous allons discuter aujourd'hui a été profondément modifié par rapport à celui sur lequel nous nous sommes positionnés au Conseil supérieur de l'égalité professionnelle (CSEP). La nouvelle mouture renforce le dialogue social et la négociation collective, elle permet la reconnaissance du fait syndical dans toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, et elle accorde une place accrue à la négociation en entreprise. Doit-on avoir peur de la négociation en entreprise ? Peut-on douter de la capacité des équipes à négocier dans une entreprise ? Pour la CFDT, qui se bat depuis longtemps pour le renforcement de la place et du rôle du syndicat dans l'entreprise, la réponse est non. La réorganisation des relations sociales autour d'un ordre public social, un rôle de la branche réaffirmé, un renforcement de la négociation d'entreprise, le mandatement dans les plus petites entreprises, toutes ces mesures sont de nature à amplifier le dialogue social et la négociation collective au plus près des réalités des entreprises et des salariés, hommes et femmes.

Pour la CFDT, les politiques économiques, les négociations et l'action sont indissociables de la question de l'égalité professionnelle : il s'agit de concevoir l'égalité en permanence, et en amont, en impliquant tous les acteurs.

Comme nous ne cessons de le répéter, le dialogue social est un enjeu de compétitivité, de progrès social, car il est un moyen pour les entreprises de s'adapter à leur environnement, tout en tenant compte des intérêts et des aspirations des salariés. Le projet de loi en l'état ne diminue pas les droits des femmes, mais offre une opportunité de faire avancer l'égalité professionnelle à la fois par la négociation et par le mandatement – en plus de la représentation accrue des femmes dans les instances représentatives du personnel (IRP), grâce à la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi. En l'occurrence, négocier dans les entreprises le temps de travail et les contreparties à d'éventuels assouplissements – plutôt que d'en rester aux sempiternelles contreparties financières – permet de mieux prendre en compte les questions de conciliation des temps. L'égalité professionnelle ne se résume pas à la réduction des inégalités salariales, elle concerne tous les sujets liés au travail. Même si elles demeurent nombreuses, les inégalités professionnelles ont été réduites ces dernières années, grâce à plusieurs évolutions législatives.

Dois-je rappeler que c'est par le dialogue social et la négociation au niveau interprofessionnel que les conditions des femmes se sont améliorées au fil du temps ? Que depuis 2012 un certain nombre de dispositifs négociés par les partenaires sociaux – complémentaire santé, règles sur le travail à temps partiel, mise en place du compte personnel de formation (CPF) – ont amélioré les conditions de vie et de travail de milliers de salariés, notamment des femmes ? En outre, la loi Rebsamen a introduit l'obligation de la parité pour les listes aux élections professionnelles, mesure pour laquelle la CFDT s'est battue, et qui va conduire à une présence significativement accrue des femmes aux tables des négociations. Dans les entreprises à majorité féminine, les représentants du personnel seront très majoritairement des femmes. La CFDT se refuse à considérer que ces femmes ne seraient pas en capacité de négocier. Par ailleurs, le dispositif du mandatement dans les très petites entreprises (TPE), dans lesquelles les femmes sont majoritaires, permettra de promouvoir les femmes aux responsabilités syndicales et ainsi de porter des revendications sur l'égalité professionnelle, pour peu que les organisations syndicales s'engagent dans cette voie.

Néanmoins, le changement culturel que requière la pratique du dialogue social ne se décrète pas, il se construit. Ce changement concerne les employeurs, les syndicalistes et les salariés. Dans ce nouveau contexte, ces derniers adapteront progressivement leur vote aux élections professionnelles et choisiront les organisations syndicales en mesure de construire des majorités et d'obtenir des évolutions favorables pour eux et pour leur entreprise.

Vous l'avez compris, pour la CFDT, ce projet en l'état ne porte pas directement atteinte à l'égalité professionnelle. J'apporterai des précisions lors des échanges qui vont suivre.

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