Intervention de Georges Pau-Langevin

Réunion du 29 mars 2016 à 17h45
Délégation aux outre-mer

Georges Pau-Langevin, ministre des outre-mer :

Sur les observations de Mme la rapporteure, nous serons assez d'accord. La loi veut donner davantage de poids à la négociation collective, ce qui pose évidemment la question de la reconnaissance des organisations syndicales locales, et des critères à définir. Nous avons en effet à vous proposer des critères propres pour reconnaître la représentativité des organisations syndicales outre-mer.

Nous avons évoqué cette question, notamment, dans la loi d'actualisation du droit des outre-mer. À l'article 7, nous avons prévu la présence, dans les caisses agricoles, de l'organisation des exploitants agricoles la plus représentative dans le ressort de la caisse.

Un fonds destiné à favoriser le dialogue social en finançant la formation des salariés serait le bienvenu. Le fonds paritaire national, institué par la loi du 5 mars 2014 pour la formation professionnelle poursuit ce même objectif. Il est abondé notamment par des contributions de l'État et des entreprises, afin d'assurer la formation économique, sociale et syndicale des salariés. Il faudrait mobiliser effectivement ce fonds pour améliorer le dialogue social en outre-mer.

Depuis des années, la formation à un dialogue social de qualité fait partie de nos préoccupations. À la Martinique, on s'y essaie depuis une dizaine d'années, et cela a donné des résultats tout à fait significatifs, en permettant de faire baisser la pression en cas de conflits – qui jusqu'alors se terminaient toujours de manière « virulente ». Nous avons donc vraiment besoin de continuer sur cette lancée, si nous voulons des négociations de qualité.

On peut aussi améliorer les moyens des acteurs du dialogue social, à travers des crédits d'heures supplémentaires, et de nouvelles formations.

En tout cas, nous souhaitons, et nous allons nous efforcer de faire en sorte que ces dispositions bénéficient à tous les outre-mer, y compris dans la fonction publique. De fait, avant cette réunion, nous avons discuté avec le ministre de la fonction publique de l'intérêt de faire bénéficier les délégués syndicaux ou les représentants du personnel des administrations de ce type de formations.

Il me semble que dans la loi, telle qu'elle existe, un certain nombre de mesures visent les négociations avec de petites entreprises ; cela mériterait d'être précisé. Il est également possible d'avoir un représentant à l'extérieur de l'entreprise, susceptible de négocier pour un certain nombre d'entreprises. Je pense que c'est sur des dispositions comme celles-là qu'il faudrait se pencher, pour essayer de mettre en place des dispositifs qui permettent réellement d'améliorer le dialogue social.

Se pose aussi la question de l'applicabilité des conventions collectives et des accords nationaux du travail en outre-mer. Plus on s'appuiera sur les accords, et plus ce sera difficile. Évidemment, je n'ai pas de ressource miracle pour faire bouger cette situation.

M. Perben avait sans doute voulu s'assurer de la position des partenaires sociaux sur les champs concernés et sur l'application géographique des accords, et tenir compte des spécificités ultramarines. Mais il faut reconnaître qu'un tel dispositif va à l'encontre de ce que l'on avait cherché dans la départementalisation : en effet, l'idée était plutôt de dire que les lois s'appliquaient directement en outre-mer, sauf disposition contraire. De surcroît, comme vous l'avez souligné, un tel dispositif compromet très souvent l'accès effectif des salariés aux dispositions des conventions et des accords qui ne prévoient pas leur application outre-mer. Je crois donc qu'il conviendrait de proposer de renverser la présomption contenue dans la loi Perben.

Il faudrait sans doute que l'on rencontre les organisations syndicales nationales pour les sensibiliser à cette question, car elles ne sont sans doute pas suffisamment nombreuses à s'intéresser à la situation des salariés dans les outre-mer.

De nombreux droits qui relèvent de la négociation locale ne sont pas ouverts aux salariés de l'outre-mer. Ainsi, 40 % des salariés de la Réunion, et 70 % des salariés de Guyane ne bénéficient pas de la couverture conventionnelle. On ne peut pas se satisfaire de telles situations.

Mon idée était surtout d'essayer de renverser la clause de la loi Perben, et de dire que dorénavant, si l'on n'a pas prévu de disposition contraire, les conventions s'appliqueront automatiquement dans les outre-mer.

Maintenant, il faut s'assurer que c'est efficace. Si nous n'avons pas d'organisations syndicales susceptibles de faire vivre de tels projets, on n'ira peut-être pas beaucoup plus loin. En tout cas, il me semble que le réclamer est déjà une manière de poser le problème et de sensibiliser tant les organismes patronaux que – surtout – les organisations syndicales ouvrières à cette difficulté. On pourrait aussi prévoir un dispositif local de consultation, qui permettrait d'éclairer les partenaires sociaux nationaux et de promouvoir la négociation au niveau local.

Enfin, vous avez parlé de la formation dans les territoires. Il est exact que les parcours de formation ressemblent à des parcours du combattant. Pour les jeunes, nous avons des moyens particuliers. Nous nous appuyons sur LADOM qui a été rénovée pour mieux répondre aux besoins. Mais nous savons que les dispositions prévues par la loi de mars 2014 pour renforcer l'effort de formation dans les PME et les TPE ne sont pas encore suffisamment appliquées dans les outre-mer. Il est sans doute nécessaire de lancer des concertations avec les partenaires sociaux et les OPCA pour améliorer la situation actuelle. Le cas échéant, au ministère des outre-mer, nous pourrions y travailler avec vous. Nous le ferons volontiers.

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