Intervention de Anne-Sophie Avé

Réunion du 30 mars 2016 à 9h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Anne-Sophie Avé, directeur des ressources humaines du ministère de la Défense :

Le ministre m'a confié les fonctions de haut fonctionnaire à l'égalité, et toutes les statistiques concernées « sexuées », y compris concernant les rémunérations, sont désormais publiées dans le bilan social, conformément à la volonté de transparence exprimée par le ministre. Les femmes représentent aujourd'hui 15,3 % des effectifs militaires, 13,9 % des officiers, et 38 % de nos civils. Le ministre voulait doubler d'ici 2019 la part des femmes dans les effectifs d'officiers généraux : c'est en bonne voie.

La cellule Thémis, a été mise en place pour accueillir les victimes d'agressions, de discriminations ou de harcèlement sexuels, mais aussi pour apporter soutien et conseil au commandement en la matière. Les choses fonctionnent bien : les victimes sont accompagnées, le commandement est conseillé, et les associations concernées sont étroitement associées, notamment aux travaux de prévention, avec des supports pédagogiques qui fonctionnent très bien. La prise de conscience, à tous niveaux de la chaîne, me semble remarquable. Auparavant, ce n'est pas que l'on cachait les choses, mais on ne savait pas les gérer. Aujourd'hui, le commandement est mieux épaulé, mieux préparé à ces situations très délicates. Il n'hésite pas à dénoncer les faits graves au titre de l'article 40 du code de procédure pénale, lorsque la victime hésite à porter plainte.

Nous avons aussi fait de considérables progrès dans la mise en place de tous les outils de la mixité. Ainsi, pour ne citer qu'un exemple qui vous paraîtra peut-être anecdotique, une note du secrétariat général pour l'administration du ministère vient de rappeler les règles applicables en matière d'opacité et de verrouillage des portes de douches.

Le ministre a reçu le 8 mars dernier une quarantaine de femmes de la défense, de tous horizons, et dévoilé une feuille de route. Dans ce cadre, se constitue un réseau de femmes qui, sur la base du volontariat, constituera un lieu d'échange. La plupart ne rencontrent pas de difficultés particulières, et être une femme dans les armées, c'est avant tout pour elles être militaire. D'autres peuvent partager leur expérience en cas de difficultés et se sentir moins seules.

S'agissant des recrutements dans le domaine de la cyberdéfense, Monsieur Villaumé, la DGA dispose d'un statut plutôt attractif, celui des ingénieurs cadres technico-commerciaux, mais le reste du ministère n'en dispose malheureusement pas. Nous y travaillons, mais pour l'heure, nous ne pouvons recruter des contractuels que dans le cadre prévu par la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État. Dans ce cadre, le niveau de salaire offert par le ministère dépend du bon vouloir du contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM), tant à l'embauche qu'à chaque renouvellement de contrat. Il nous est donc difficile de proposer des contrats et des évolutions de carrière attractifs. On touche là aux limites du statut général, et une politique interministérielle plus ambitieuse en matière de recrutements contractuels nous serait fort utile.

Concernant, Monsieur Meslot, le coût du traitement des erreurs du système Louvois, nous n'avons pas de comptabilité analytique précise, mais on peut l'évaluer pour 2015 à 26,7 millions d'euros. Ce sont 150 emplois équivalents temps plein qui sont spécialement mobilisés à Nancy, 44 à Toulon, 25 pour le centre de maintenance interarmées de la solde, 27 au service ministériel opérateur des droits individuels (SMODI) au sein du commissariat aux armées, ainsi que 232 vacataires. 375 millions d'euros d'indus ont été notifiés, 348 millions d'euros mis en recouvrement et 210 millions d'euros ont été encaissés. Bref, les chiffres donnent le vertige, et l'opération aura été catastrophique pour les comptes publics. Le désastre est aussi et surtout social, car la confiance est entamée entre l'administration et les militaires ou leurs familles, d'autant que les erreurs tombent souvent sur ceux qui sont engagés en OPEX, loin de chez eux.

Nous avons bien pris en compte le projet de la retenue à la source, mais nous ne disposons pas encore des spécifications permettant d'anticiper. Informatiquement, cela n'est pas la meilleure nouvelle qui soit… Si cette retenue à la source est bien mise en oeuvre au 1er janvier 2018, elle interviendra en effet presque en même temps que la « bascule » de la marine sur Source Solde, sachant que l'armée de terre utilisera toujours Louvois, qu'il faudra donc y intégrer la retenue à la source (RAS) et que l'armée de l'air sera encore sur l'ancien dispositif (gestion de solde). Notez toutefois que c'est loin d'être la seule modification réglementaire qui nécessite une modification des systèmes d'information de liquidation des soldes, même si je vous concède que celle-ci sera énorme. Nous n'avons pas encore de visibilité sur les détails de l'opération, mais d'autres ministères doivent être inquiets aussi.

La sécurisation de la solde passe aussi par la clarification de la chaîne de liquidation de la solde. Il est en effet toujours difficile de décrire les procédures en vigueur eu égard aux pratiques d'une armée à l'autre et donc de savoir demain qui devra faire quoi. Nous y travaillons. La comitologie est intense, sous l'égide du cabinet du ministre. Il faut que les SIRH convergent, et nous ne sommes pas au bout de nos peines.

Concernant les ouvriers de l'État, je me dis, en vous écoutant Monsieur Rousset, qu'une voie moyenne pourrait permettre de mettre fin à la dichotomie « tout ouvrier de l'État versus tout CDI ». La question est au centre d'un débat interministériel avec la direction générale de l'administration et de la fonction publique qui souhaite des statuts interministériels, démarche que nous approuvons. Mais il ne nous a été proposé à ce jour aucun statut attractif retenant les avantages du statut d'ouvrier de l'État, tels que les examens professionnels permettant une progression, tout en prenant en considération les reproches faits à ce statut. C'est pour cela que nous sommes attachés au statut d'ouvrier de l'État en raison des avantages qu'il présente, dont la pérennité. Un statut de contractuel, tel que nous l'envisageons aujourd'hui, serait un statut complémentaire, car dans les métiers concernés, il est difficile de conserver le personnel contractuel au-delà de trois à six ans ; si nous n'avions plus que des contractuels, nous deviendrions une sorte d'école de formation et d'apprentissage pour le maintien en condition opérationnelle aéronautique et l'armement…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion