Intervention de Myriam El Khomri

Réunion du 30 mars 2016 à 19h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Myriam El Khomri, ministre du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social :

Tout à fait. La France a fait un autre choix – que nous maintenons bien évidemment. Je peux vous dire que lors des concertations qui ont eu lieu, j'ai opposé un refus catégorique à ceux qui souhaitaient modifier les dispositions relatives au temps partiel dans le cadre du rapport Combrexelle, comme nous le faisons concernant la modulation du temps de travail. Mais, la France étant le deuxième pays utilisateur des contrats à durée déterminée, nous avons quand même des questions à nous poser. Nous devons impérativement mettre un terme à la réticence, réelle ou ressentie, des employeurs à embaucher des salariés en contrat à durée indéterminée.

Les accords de branche, souvent négociés par les représentants syndicaux et patronaux issus des grands groupes, ne permettent pas aux petites entreprises de s'adapter. Il faut donc que nous arrivions à réaffirmer le rôle protecteur de la branche pour les petites entreprises mais aussi à leur accorder certaines souplesses dans la négociation. Je sais qu'il y a aujourd'hui une forme de rejet « culturel » du mandatement et que, malheureusement, les citoyens de notre pays manquent de confiance envers les syndicats. Mais nous sommes à la croisée des chemins. Élargir le champ de la négociation au plus près du terrain pour aider les entreprises à mieux s'adapter aux pics d'activité permet aussi de re-légitimer ces acteurs de terrain. N'ayons pas une vision idyllique de notre pays, car, encore une fois, si nous avons la législation la plus protectrice qui soit en matière de travail à temps partiel, nous sommes le deuxième pays utilisateur de CDD, ce qui explique que nombre de personnes se trouvent durablement dans une spirale infernale.

La loi du 14 juin 2013, dont vous m'avez demandé de dresser un bilan, a permis de conférer des droits aux salariés travaillant à temps partiel tout en offrant plus de souplesse aux entreprises. À ce jour, une soixantaine d'accords de branche ont été déposés auprès de mes services, couvrant un peu moins de la moitié des salariés à temps partiel en France. Actuellement, lorsque des accords de branche prévoient une durée minimale inférieure à 24 heures, ils doivent prévoir des contreparties au profit des salariés, notamment en termes de regroupement d'horaires. Je souhaiterais d'ailleurs que, dans le cadre du plan « 500 000 actions de formation supplémentaires », nous lancions des expériences de regroupement d'heures de travail et d'heures de formation semblables à celles qu'a pu mener Pascale Gérard dans le champ des services à la personne lorsqu'elle était vice-présidente de la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur. Nous sommes en train de vérifier s'il serait possible de le faire. Par ailleurs, les accords qui dérogent aux règles relatives aux coupures doivent prévoir des contreparties financières ou sous forme de repos. Mes services, lorsqu'ils contrôlent la légalité de l'extension des accords, sont extrêmement vigilants sur ces points précis.

Bref, si la loi de sécurisation de l'emploi a apporté des garanties nouvelles aux salariés à temps partiel en leur permettant d'accéder aux droits sociaux, des souplesses ont dans le même temps été accordées aux entreprises, sous forme de dérogations dans les secteurs où il n'est pas possible d'aller jusqu'à 24 heures de travail. La question des groupements d'employeurs s'étant posée, un des articles du projet de loi vise à ce que les entreprises puissent bénéficier d'aides à l'emploi dans le cadre de ces groupements, qu'il nous faut, je crois, favoriser encore davantage – et pas seulement dans le domaine agricole. Je vous invite donc à proposer des améliorations en la matière.

Enfin, je me suis engagée à fournir au CSEP d'ici à cinq mois un bilan détaillé des sanctions qui auront été appliquées, bilan que je pourrai aussi venir vous présenter. Nous sommes en train d'examiner quelques accords de branche semblant poser problème.

En matière de travail saisonnier, le projet de loi constitue une avancée majeure puisqu'il en sécurise la définition. Cela fait suite à des travaux parlementaires menés récemment dans le cadre du Comité interministériel de la montagne, qui s'est tenu le 25 septembre 2015 et auquel a participé Mme la rapporteure. Nous invitons également les partenaires sociaux à négocier sur les clauses de reconduction des contrats de travail saisonnier. À défaut de négociation, il est prévu que l'État puisse intervenir par ordonnance. Je pense que cela protégera également les femmes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion