Intervention de Martial Brun

Réunion du 23 mars 2016 à 16h00
Mission d'information relative au paritarisme

Martial Brun, directeur général du Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise, CISME :

Aucun délai n'était fixé dans la loi et, dès lors qu'elle est applicable, on peut parler d'un retard dans sa mise en oeuvre. Cela dit, nous avons constaté sur le terrain que les contrats signés avec une certaine précipitation pouvaient être un peu creux. Il n'est pas certain que ceux qui n'aboutissent que dans la période actuelle soient ceux qui traduisent le moins bien l'intention du législateur. Une circulaire de la direction générale du travail avait décrit une séquence qui faisait se succéder l'élaboration d'un projet de service, l'agrément, et la contractualisation : cela demande un certain temps.

Je viens d'évoquer l'agrément de fonctionnement des services de santé. Il est délivré par l'État, par l'intermédiaire de la DIRECCTE. Il est arrivé que des priorités d'action adoptées de façon unanime par un conseil d'administration paritaire soient modifiées par l'agrément – par exemple parce que les partenaires sociaux s'étaient accordés sur une mesure dérogatoire au droit. Les deux responsabilités s'opposent donc parfois, même si l'on comprend bien que l'État veille au respect d'une certaine cohérence et à l'équité de traitement sur tout le territoire et dans toutes les entreprises. Je crois que le projet de loi réformant le code du travail entend faire bouger les choses pour éviter que de tels consensus ne soient ainsi bloqués.

Notre environnement comprend également l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS), l'agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT) – avec ses agences régionales –, et l'organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP) – avec ses agences régionales. Tous ces acteurs, dont les conseils d'administration sont paritaires, peuvent agir dans l'entreprise : cela risque de causer une certaine confusion en même temps que cela rend nécessaire la cohérence des partenaires sociaux. Ces derniers adoptent parfois des logiques qui peuvent se télescoper – la logique assurantielle et la logique de prévention ne sont pas nécessairement complémentaires. Cela est d'autant plus délicat que certaines personnes physiques siègent à la fois dans un conseil d'administration de service de santé, au COCT, au COREOCT, dans le conseil d'administration de l'INRS, et dans celui de l'ANACT. Ces situations existent et témoignent peut-être de la difficulté que rencontrent les partenaires sociaux pour mobiliser les ressources humaines nécessaires pour occuper tous les sièges de ces nombreuses instances.

Un autre acteur émerge : les institutions de prévoyance. Ces derniers mois, elles ont fortement investi le champ de la santé au travail. Dans leurs conseils d'administration, également paritaires, siègent parfois aussi les personnes physiques aux multiples mandats que je citais.

Cette politique de santé au travail se mène en convergence avec les politiques de santé. Lorsque le député Michel Issindou a été chargé par le Gouvernement d'une mission sur la médecine du travail, elle lui a été confiée à la fois par le ministre du travail et par la ministre de la santé. L'État cherche aujourd'hui à faire converger les plans de santé publique et les plans nationaux de santé environnement (PNSE) avec les plans de santé au travail. Lorsque l'on aborde la question du cancer, par exemple, il faut tenir compte de ce qui peut être lié aux expositions professionnelles autant que des facteurs environnementaux. Le préfet de région a de nouveau la responsabilité de décliner ces plans au travers des agences régionales de santé (ARS), au sein desquelles siègent désormais des représentants des services de santé au travail. Ils élaborent des plans régionaux de santé publique (PRSP) et des plans régionaux santé environnement (PRSE), et bâtissent, au niveau local, un schéma régional d'organisation des soins (SROS). Lorsque vous voulez signer un contrat d'objectifs et de moyens, vous passez en commission, au niveau régional, au COREOCT, après avis de l'ARS. On recherche clairement une convergence des politiques de santé.

Le schéma que je vous présente est complexe tout en étant construit sur de multiples équilibres et de réelles responsabilités. Toucher à ces équilibres reviendrait aussi à toucher aux responsabilités engagées. On pourrait imaginer que l'État pilote directement les services de santé au travail, mais cela finirait par poser la question de la responsabilité de chaque employeur.

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