Je ne sais pas d'où viennent ces données et je n'ai pas cet article en tête. En revanche, je confirme qu'il existe des incongruités : les analyses qu'essaye de mener le Trésor américain sur sa base d'investisseurs montrent que la Belgique détient des
quantités de dette américaine étonnantes. Cela s'explique par le fait que la Belgique est le siège d'Euroclear, organisme de dépôt et de règlement-livraison par lequel transitent un certain nombre de comptes. Mais derrière Euroclear il y a probablement des comptes-titres qui sont mouvementés depuis d'autres pays.
De l'analyse du FMI, on peut déduire que la dette est répartie entre un tiers d'investisseurs résidents, un tiers en zone euro et un tiers hors zone euro. L'euro étant notre monnaie : on peut considérer que nous avons deux tiers d'investisseurs résidents dans notre propre zone.
Ce graphique montre l'évolution des catégories d'investisseurs.
Tout instrument de mesure a ses limites, mais notre dette étant importante, on peut se fier à la loi des grands nombres… Ce qui nous intéresse comme émetteurs, ce n'est en effet pas de savoir si tel ou tel investisseur précis détient des titres de dette française mais de comprendre les grands mouvements de marché qui peuvent se produire. Pourquoi, par exemple, un grand investisseur décide-t-il de vendre ? Faut-il voir là le signe d'une défiance, la conséquence d'une évolution de la réglementation… ? C'est ce type d'information qui a de la valeur pour nous en tant qu'émetteur.
Cette base est relativement stable, même si l'on voit monter en puissance sur le schéma les « autres secteurs », c'est-à-dire le secteur public, qui comprend la Caisse des dépôts et consignations et la Banque de France. Cette montée en puissance est une conséquence de la politique d'assouplissement quantitatif de la Banque centrale européenne (BCE), qui s'opère par l'intermédiaire de la Banque de France (Public Sector Purchase Programme, PSPP).
Nous disposons également de données plus « molles », au sens où elles ne sont pas auditées. Nous ne les présentons donc pas publiquement. Elles proviennent de nos spécialistes en valeur du Trésor (SVT), ceux qui achètent lors de nos adjudications, pour revendre ensuite ces titres aux investisseurs sur le marché secondaire. Ils ont obligation de nous communiquer – c'est une règle de reporting commune aux États de la zone euro – leurs opérations d'achat et de vente, soit entre SVT, soit avec des investisseurs finaux, par type de maturité et par pays ou groupe de pays… Pour les pays de l'OCDE à l'exception du Japon, nous pouvons connaître les types d'acheteurs par pays – assureurs, trésoreries de banques, asset managers, gestion alternative… Parfois, nous avons ces données par groupe de pays. Il faut donc mixer ces données pour avoir de l'information.
De ces statistiques, nous pouvons déduire que par le passé, environ la moitié des flux de dette française étaient absorbés par les banques centrales et les entités du secteur public, c'est-à-dire les fonds souverains. C'est plutôt quelque chose dont il faut se réjouir.
Les banques centrales, qui ont au cours de la dernière décennie augmenté leurs réserves de change, souhaitent se diversifier en achetant des titres de dette française – elles ne veulent pas investir toutes leurs réserves de change dans une seule monnaie, par exemple le dollar. Cette volonté constitue, je le souligne, une bonne nouvelle : les banques centrales sont des investisseurs caractérisés par une relative insensibilité aux prix, mais aussi par une grande stabilité. Malgré les taux bas, elles continuent donc d'acheter de la dette française, comme des titres des autres grands pays bien notés de la zone euro.
Vous nous demandiez également si la faiblesse des taux d'intérêt actuels ne devait pas nous amener à renégocier de larges stocks de dette déjà existants à des conditions plus favorables. Vous souhaitiez savoir si nous pouvions profiter des taux bas pour allonger la maturité moyenne de la dette.