Intervention de Anthony Requin

Réunion du 15 mars 2016 à 17h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Anthony Requin, directeur général de l'Agence France Trésor, AFT :

Pour des raisons de profondeur de marché, nous ne pouvons pas – même pour profiter d'un moment où les taux sont particulièrement bas – émettre des quantités illimitées de titres à 30, 40 ou 50 ans. De plus, si nous devions racheter d'énormes quantités de dette émise précédemment, nous le ferions au cours de ces dettes au jour du rachat. Il n'y aurait donc pas de gain important : certes, nous pourrions racheter de la dette pour ré-émettre à taux bas, mais nous rachèterions cette dette à un prix beaucoup plus élevé. En taux actuariel, ce serait neutre, nous ne serions donc pas gagnants.

Notre objectif est de demeurer un émetteur régulier et transparent. Nous évitons de créer des embardées qui provoqueraient de brusques variations de notre courbe de taux – ce que les investisseurs n'aiment pas. Nous nous efforçons donc de lisser le profil d'amortissement. Nous effectuons parfois, pour cette raison, des rachats par anticipation de titres que nous n'émettons plus. On les voit sur ce graphique.

Pour l'année 2015, nous avions obtenu du Parlement l'autorisation d'émettre pour 187 milliards d'euros de dette, nette des rachats, et nous avons effectué des émissions brutes pour 220 milliards d'euros. Nous avons effectué 33 milliards de rachats, afin que notre programme en 2016 soit comparable à celui de l'année 2015.

Nous avons donc tiré avantage des taux très bas, puisque nous avons sécurisé, pour une durée moyenne de 9,4 années, 220 milliards de dette à un taux historiquement bas de 0,63 % en moyenne.

Si nous avons pu le faire, c'est d'abord parce qu'il existe une demande du marché pour les titres de la dette française. Notre programme d'exécution régulier mois par mois se déroulait de façon satisfaisante : nous étions un peu en avance, et nous avons pu en profiter pour racheter un peu plus de titres et donc allonger la maturité moyenne à l'émission, parce que la demande était là. Inversement, au cours de la première partie de l'année 2015, les taux étaient très bas : les investisseurs finaux – assureurs, gestionnaires de fonds… – ne voulaient pas acheter nos titres à moyen et long terme à taux faible ou négatif. Ils ne sont revenus sur le marché qu'après le double mouvement de hausse des taux intervenu en avril et en mai. Ils étaient alors prêts à revenir acheter de la dette française pour des maturités un peu plus longues, à 10 ans, 15 ans. Si nous avions émis un surcroît de dette à maturité longue au premier trimestre 2015, l'absence de demande aurait provoqué un envol des taux ; c'est à partir du mois de juin, lorsque la demande telle qu'elle nous était rapportée par nos SVT est revenue, que nous avons pu émettre des titres longs. Et, à la fin de l'année 2015, la maturité moyenne d'émission était supérieure à celle de l'année 2014. Voilà comment nous nous efforçons de tirer avantage des taux bas ; mais nous ne pouvons pas forcer le marché à absorber des titres dont il ne voudrait pas.

En quoi le fait que la dette soit concentrée entre les mains de quelques investisseurs, voire d'un seul, est-il un problème ? Tout d'abord, les informations dont nous disposons nous laissent penser que cette situation n'est pas la nôtre : je ne pense pas qu'on puisse imaginer qu'un seul investisseur puisse détenir plus de 20 % de la dette française.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion