Intervention de Anthony Requin

Réunion du 15 mars 2016 à 17h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Anthony Requin, directeur général de l'Agence France Trésor, AFT :

Il existe un marché structuré des OAT aux particuliers : ceux-ci peuvent, via Euronext, acquérir des titres d'État. Les SVT ont l'obligation de leur proposer des cotations. Mais en raison de la faiblesse des taux d'intérêt, les particuliers ne sont plus intéressés par ces titres. Ce n'est pas propre à la France : notre homologue, la Deutsche Finanzagentur, a pendant des années géré des comptes-titres de particuliers ; mais elle a fermé ce service en 2012, car il n'y avait plus de demande.

Les Français détiennent, il faut le souligner, beaucoup de dette française, mais pas en direct – via l'assurance-vie, les comptes bancaires, le livret A… qui apportent aussi une diversification des risques.

Les dernières opérations d'émissions directes vers les particuliers que j'ai en tête remontent aux années 2012 : elles ont été effectuées par le Trésor belge, EDF, le Crédit foncier de France sur des titres à 5 ans. Ils offraient en général des taux supérieurs de 150 à 200 points de base supérieurs à ceux proposés par l'État au même moment. Pour attirer les particuliers, il faut un certain niveau de rendement : aujourd'hui, cela se traduirait effectivement pour nous par une augmentation de la charge de la dette.

Vous nous avez également interrogés sur les risques pesant sur la dette publique française en cas de remontée des taux d'intérêt.

Nous publions, au titre de la justification au premier euro du programme 117, une analyse de sensibilité.

Ce graphique montre ce qui se produirait en cas de hausse brutale des taux de 100 points de base – dans le second cas, avec un choc simultané d'inflation de 0,5 %. Les conséquences sur la charge de la dette seraient d'abord modérées, puis augmenteraient progressivement.

Ce type de graphique a souvent un effet anxiogène : les conditions de taux actuelles sont très satisfaisantes, puisqu'elles nous permettent de stabiliser, voire de commencer à diminuer la charge de la dette, mais combien de temps cela durera-t-il ? Quand les taux se normaliseront, n'allons-nous pas faire face à une charge de la dette qui ne sera plus tenable ?

Ces inquiétudes sont parfois quelque peu excessives. Certes, un choc de taux peut être un choc de crédit : le marché, les agences de notation, les investisseurs cessent tout à coup de vous faire confiance, et ce qui se traduit par une hausse des taux de 100 points de base représentative d'une appréciation à la hausse du risque de crédit. Cela, effectivement, c'est dangereux. Mais un choc de taux peut aussi refléter un redémarrage de la croissance, et une anticipation d'inflation à la hausse : ce serait alors un choc positif, qui produirait sur les recettes fiscales un effet bien plus favorable que l'augmentation de la charge de la dette qui en résulterait. Nous serions, cette fois, gagnants.

Se focaliser seulement sur la charge de la dette est donc une erreur de raisonnement, une forme de myopie : il faut s'intéresser aussi aux recettes fiscales qui dépendent de la croissance et de l'inflation, nous avons plus à y gagner qu'à perdre. Au total, le choc est positif.

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