Intervention de Gérard Sebaoun

Réunion du 7 avril 2016 à 15h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Sebaoun :

Cet amendement a trait aux postes à risque. La notion de tiers, que nous avons introduite dans la loi de 2015 relative au dialogue social et à l'emploi est, selon les syndicats de médecins du travail notamment, vaste et difficile à définir. Le présent projet de loi la conserve néanmoins, tout en la restreignant à « l'environnement immédiat de travail ».

Actuellement, les postes de sécurité sont soumis à des mesures de surveillance strictes puisqu'ils nécessitent une visite de la médecine du travail, d'une part, et un certificat délivré par des médecins experts, d'autre part. C'est le cas notamment pour les pilotes de ligne ou les conducteurs de train.

Par ailleurs, on crée la notion de poste présentant un risque pour le salarié, pour ses collègues et pour les tiers. Ce faisant, on bascule, me semble-t-il, vers une médecine qui n'est plus préventive. Je prendrai trois exemples pour illustrer mon propos. Lors de son examen d'embauche, on découvre qu'un salarié est amblyope, c'est-à-dire qu'il a une faiblesse visuelle très importante. Doit-on lui interdire de travailler dans le bâtiment, où les postes sont à risque ? Par ailleurs, que se passera-t-il si un salarié épileptique parfaitement stabilisé cache son affection au moment de son embauche ou si un salarié diabétique souffre de crises d'hypoglycémie, ce qui présente un risque pour lui-même, pour ses collègues et éventuellement pour des tiers ?

La notion de poste à risque et, par conséquent, celle de postes qui ne sont pas à risque sont donc extrêmement difficiles à déterminer par décret. Le médecin du travail est pris en tenaille, car il doit délivrer un certificat d'aptitude qui n'a pas grand intérêt dans la mesure où il ne dispose pas toujours de tous les éléments. On entre ainsi dans un autre système, écarté par Hervé Gosselin dans son rapport de 2007, qui rapproche la médecine préventive telle qu'elle a été construite depuis 1946 de la médecine dite « de sécurité » qui est en vigueur dans d'autres pays. Nous pourrions basculer véritablement vers cet autre système, et pourquoi pas ? De fait, puisqu'on manque de ressources, il faudra bien que le rôle des médecins évolue. Mais la question n'est pas tranchée ; nous naviguons entre deux eaux. Quoi qu'il en soit, je ne suis pas certain que ce soit au médecin d'assumer la responsabilité de la sécurité des tiers lorsqu'il sélectionne le salarié au moment de l'embauche.

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