Je félicite Mme Orphé pour son rapport qui dresse un constat fidèle de la situation en outre-mer. Ce rapport met en évidence une inadéquation du dispositif dérogatoire, notamment en ce qui concerne les jeunes. En revanche, le service militaire adapté fonctionne très bien outre-mer, puisque 76 % des jeunes concernés entrent en insertion avec des emplois durables.
Cela montre bien que l'on ne peut pratiquer l'insertion à marche forcée : cette démarche ne peut s'accomplir qu'en recueillant la volonté de la personne concernée et en tenant compte de la structure du travail spécifique aux départements d'outre-mer. En Guadeloupe, un département que je connais, les petits boulots – ceux de pompiste ou de porteur, par exemple –, qui peuvent tout à fait fournir les revenus nécessaires au fonctionnement d'une famille, ont été préservés jusqu'à présent et doivent continuer à l'être : il ne faut pas tout bouleverser en cherchant à appliquer sans discernement des recettes qui ne seraient pas efficaces.
Les territoires d'outre-mer sont également marqués par une importance particulière du travail saisonnier dans les domaines de l'agriculture et du tourisme. S'il faut une définition du travail saisonnier, comme vous l'indiquez, il faut aussi mettre en place des formations professionnelles débouchant sur des diplômes, car ce sont les seules qui permettent d'accéder à des emplois stables. En effet, le tourisme représente à la fois un important vivier d'emplois et, pour les personnes concernées, un moyen d'accroître leurs compétences et, à partir d'une formation initiale qualifiante, de devenir progressivement de vrais professionnels – ce qu'ils ne pourront pas faire en passant continuellement d'un emploi saisonnier à un autre.
Vous dites qu'il y a peu de dialogue social en outre-mer, mais votre proposition ne me semble pas très rassurante sur ce point, en situant la négociation prioritairement au niveau des entreprises. La faiblesse en nombre et en formation de la représentation syndicale dans les départements d'outre-mer risque de déséquilibrer encore plus la négociation collective, d'où l'extrême importance de vos propositions relatives à la formation des représentants des salariés – c'est la proposition 10 – et à la nomination d'élus mandatés par les organisations représentatives de salariés dans les outre-mer – c'est la proposition 11.
Pour ce qui est du temps partiel, le projet de loi prévoit une réduction du délai de prévenance, qui aura vocation à s'appliquer aux nombreuses femmes travaillant dans la grande distribution. Or, en outre-mer – je me réfère à nouveau à l'exemple de la Guadeloupe –, la grande distribution est une activité souvent exercée en situation de quasi-monopole, ce qui risque d'aggraver la situation de précarité des salariés concernés, qui sont en grande partie des femmes. Si la loi passe en l'état, nous devrons être très attentifs à ce problème.
Enfin, pour améliorer la situation de l'emploi, il nous faut lutter contre l'économie souterraine, que ce soit en outre-mer ou en métropole. Chacun sait que des jeunes travaillant au noir ou se livrant à des trafics peuvent gagner plus en quelques jours que leurs parents en un mois de travail : il y a là un vrai problème que nous devons combattre sans relâche.