Intervention de Jacques Myard

Réunion du 29 mars 2016 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Myard :

L'exposé de la rapporteure a été particulièrement intéressant. Je me limiterai à rappeler quelques points pour une mise en perspective.

L'arbitrage a été très à la mode dans les années 1970 et 1980 et a notamment été porté par la commission des Nations unies pour le droit commercial international (CNUDCI). La Chambre de commerce et d'industrie de Paris a elle-aussi eu tendance à multiplier les arbitrages. Mais, au fil du temps, il est apparu que la question de l'exécution des sentences était difficile, et qu'il n'est parfois par aidé d'obtenir l'exequatur dans certains pays. On a donc déchanté. Néanmoins, l'arbitrage reste dans certains cas un moyen rapide de résoudre des litiges.

Le dispositif des accords français se fonde certes sur les dispositions prévues par l'OCDE dans les années 1950, mais il a été considérablement amélioré et modifié dans les années 1980, car ce qui était prévu à l'origine était squelettique. Ce ne sont cependant pas les accords les plus précis qui sont nécessairement les plus protecteurs. Certaines notions telles que celle de l'indemnisation juste et préalable renvoient à un corpus bien étayé en droit international.

C'est celui qui a été utilisé lors des nationalisations en 1981. Il n'y a pas que les traités qui puissent entraîner des charges pour les États du fait de leur législation. Le Conseil d'État a posé en droit interne le principe de la responsabilité du fait des lois en 1938 dans l'arrêt Société anonymes des produits laitiers La Fleurette.

La justice n'est pas homogène dans l'Union européenne et le degré de confiance n'est pas le même dans tous les États. Cela a été pris en compte par la cour d'appel de Montpellier qui a refusé l'exécution d'un mandat d'arrêt européen vers un pays de l'Est où les droits de la défense n'étaient pas respectés. C'est une illustration du danger de tous les mécanismes d'extradition automatique.

L'absence de transparence sur les négociations transatlantique n'est pas admissible, mais c'est aussi une conséquence du fait que les États membres n'utilisent pas leurs pouvoirs propres. C'est une question de volonté politique. Alain Juppé a une fois réussi à faire plier un négociateur européen.

Pour ce qui concerne les États-Unis, il est clair qu'ils violent le droit international public par leurs dispositions extraterritoriales. Ils vont beaucoup trop loin en matière de concurrence et de fusion, et s'arrogent une compétence juridictionnelle beaucoup trop étendue sur la base de l'usage du dollar. Mettre fin à cela exige d'aller à l'arbitrage entre États avec eux et de montrer de la détermination, du courage et de la volonté politique. Il faut savoir dire non aux demandes des organismes américains. J'ai eu à le faire par le passé vis-à-vis de la Security Exchange Commission (SEC). Les entreprises françaises condamnées au titre des dispositions extraterritoriales arbitrent en faveur du paiement des amendes plutôt que de renoncer à leur activité sur le territoire américain. Les États n'ont pas, eux, à faire de tels arbitrages, car ils doivent défendre leur souveraineté.

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