Intervention de Guy-Michel Chauveau

Réunion du 29 mars 2016 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy-Michel Chauveau, rapporteur :

La réintégration par la France de la structure du commandement intégré de l'OTAN, en 2009, conduit naturellement à se poser la question de la ratification du protocole de Paris du 28 août 1952 sur le statut des quartiers militaires internationaux créés en vertu du traité de Washington du 4 avril 1949 créant l'Alliance atlantique.

Ce protocole a été une première fois ratifié par la France, le 20 janvier 1955, alors que notre pays, membre fondateur de l'Alliance, accueillait non seulement le siège de l'OTAN, mais aussi le Grand quartier général des puissances alliées en Europe (GQGPAE ou SHAPE en anglais), à Rocquencourt. À l'Assemblée nationale, le rapporteur en était le général Pierre Billotte.

Ce protocole a été dénoncé en 1966, lorsque la France a décidé, dans les circonstances historiques que nous connaissons, de quitter la structure de commandement intégrée.

Cinquante ans après, la démarche inverse s'impose.

D'une part, la pertinence de la réintégration opérée à partir de 2009 a été confirmée dès novembre 2012 par le rapport pour le Président de la République française sur « les conséquences du retour de la France dans le commandement intégré de l'Otan, sur l'avenir de la relation transatlantique et les perspectives de l'Europe de la défense » établi par M. Hubert Védrine, ancien ministre des affaires étrangères.

Ensuite, le protocole est un texte uniquement technique, de conséquence, dont les dispositions de type « accord de siège d'une organisation internationale » ne soulèvent pas de difficulté. Il définit le cadre juridique, fiscal et douanier du stationnement des quartiers généraux interalliés et accorde une couverture juridique administrative, douanière et fiscale à leurs personnels militaires et civils, ainsi qu'à leurs ayant droits. Il complète et précise la convention de Londres du 19 juin 1951 entre les États parties au Traité de l'Atlantique Nord sur le statut de leurs forces, dite SOFA OTAN (Status Of Force Agreement), sur le statut des forces armées d'un pays membre de l'Alliance lorsqu'elles sont déployées sur le territoire d'un autre État membre. Cette convention n'a d'ailleurs jamais été dénoncée par la France.

De plus, le Protocole de Paris n'implique aucune inflexion ni aucun infléchissement de notre position au sein de l'OTAN.

Comme l'a précisé le secrétaire d'État aux affaires étrangères, M. André Vallini, lors de l'adoption du projet de loi au Sénat, il faut se garder de donner à l'accession au protocole de Paris une portée qu'elle n'a pas.

Ainsi, le protocole de Paris ne remet en cause aucune des conditions mises à la réintégration en 2009.

Il n'implique aucun infléchissement de notre position au sein de l'OTAN où la France continuera de faire entendre la voix d'un allié « loyal, solidaire, mais indépendant ». Il n'amoindrit en aucun cas nos ambitions pour l'Europe de la défense. Il ne porte pas non plus atteinte à l'autonomie et l'indépendance de la politique de défense de la France, et ne porte non plus aucune atteinte à sa souveraineté.

L'accession au Protocole de Paris ouvre à l'opposé la perspective d'une valorisation sur notre territoire des quartiers généraux et structures militaires français.

Cela n'interviendra pas de façon automatique et directe.

Il faut, en effet, une décision spécifique conformément à l'article 14 qui prévoit que le Conseil de l'Atlantique Nord peut décider d'appliquer tout ou partie du protocole à un « quartier général militaire international ».

Certaines structures situées en France pourraient faire à l'avenir, si nécessaire, l'objet d'une décision dite « d'activation » par le Conseil de l'Atlantique Nord, à l'unanimité, si la France le demandait. En l'état, pourraient être concernés : le quartier général du Corps de réaction rapide-France (CRR-Fr), situé à Lille ; le quartier général du Corps de réaction rapide européen (CRR-E), situé à Strasbourg ; le quartier général de la force aéromaritime française de réaction rapide (FRMARFOR) ; le centre d'excellence qu'est le centre d'analyse et de simulation pour la préparation aux opérations aériennes (CASPOA), localisé à Lyon-Mont-Verdun.

Actuellement, selon les chiffres communiqués par le ministère de la défense au rapporteur du Sénat, 1 485 militaires issus de pays de l'OTAN sont affectés en France. Parmi eux, 240 seraient susceptibles de bénéficier du protocole de Paris.

Ainsi, à quelques mois du prochain sommet de l'OTAN, qui aura lieu les 8 et 9 juillet 2016 à Varsovie, la France, qui est l'un des très rares membres de l'Alliance à avoir une capacité militaire opérationnelle de premier plan, ne peut que gagner à conforter son influence au sein de l'Alliance en montrant qu'elle est prête, si nécessaire, à développer ses quartiers généraux en accueillant sur son sol des personnels des armées alliées dans les mêmes conditions que les autres États membres.

Au surplus, il faut toujours le rappeler, l'Alliance atlantique est une alliance défensive fondée sur le principe de l'assistance mutuelle en cas d'attaque armée contre un de ses membres, comme le prévoit l'article 5 du traité de 1949.

C'est dans cette perspective que doit être adopté, sans réserve, le présent projet de loi.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission adopte le projet de loi (n° 3578) sans modification.

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