Intervention de Jean-Yves Le Déaut

Réunion du 3 mars 2016 à 9h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Le Déaut, député, président :

Abordant maintenant l'étude de faisabilité sur les biotechnologies, je commencerai par une petite introduction, Mme Catherine Procaccia développera ensuite la technique nouvelle – dénommée CRISPR-Cas9 – qui se développe de manière exponentielle au niveau mondial, puis je vous indiquerai le périmètre de l'étude que nous vous proposons de mener.

Je remercie Mme Hélène Bergès, chercheuse à l'Institut national de recherche agronomique (INRA), membre du conseil scientifique de l'Office, d'être présente aujourd'hui parmi nous.

La commission du développement durable de l'Assemblée nationale a saisi l'Office, le 11 février 2015, d'une « demande portant sur les enjeux économiques et environnementaux des biotechnologies », justifiée par « l'intérêt d'effectuer un point sur l'état des recherches en matière de biotechnologies ».

Le bureau de l'Office a cependant souhaité attendre que le rapport « Agriculture-Innovation 2025 » soit remis aux trois ministres chargés respectivement de l'agriculture, de l'enseignement supérieur et de la recherche et du numérique, le 22 octobre 2015. Ce rapport a été rédigé par M. Jean-Marc Bournigal, président de l'Institut de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA), M. François Houiller, président de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), M. Philippe Lecouvey, directeur de la fédération des quatorze instituts techniques agricoles (ACTA) et M. Pierre Pringuet, président du conseil d'administration d'AgroParisTech. Nous avons reçu plusieurs des auteurs du rapport, en juin 2015 puis en février 2016.

Le rapport remis aux ministres traite, dans son axe n° 5, de la génétique et des biotechnologies. Il propose quatre projets visant à : développer la sélection génomique animale et végétale, assurer la maîtrise des nouvelles technologies, relever l'enjeu industriel des métabolites secondaires, leur diversification et leur développement et faire évoluer les procédures et protocoles pour favoriser le progrès génétique et son adaptation.

Ce rapport n'épuise cependant pas le sujet, loin de là. L'Office a désigné, le 24 novembre 2015, M. Jean-Yves Le Déaut, député, et Mme Catherine Procaccia, sénateur, comme rapporteurs d'une étude sur les biotechnologies.

Cette nouvelle étude actualiserait un travail permanent de l'OPECST sur les biotechnologies, qui a commencé avec le rapport de M. Daniel Chevallier, député élu des Hautes-Alpes, en 1990, à l'occasion de la première transposition d'une directive européenne sur les biotechnologies, puis a continué avec notamment les rapports sur les organismes génétiquement modifiés (OGM) que j'ai eu l'honneur de présenter en 1998 et en 2005 et, dernièrement, les rapports de 2012 de Mme Geneviève Fioraso sur la biologie de synthèse et de M. Bruno Sido et de moi-même sur l'étude de M. Gilles-Eric Séralini sur le maïs transgénique NK 603.

Avec Mme Catherine Procaccia, nous avons procédé à onze auditions entre décembre 2015 et février 2016. Nous avons pris connaissance de la rupture technologique considérable que représente la découverte du procédé CRISPR-Cas9 (« Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats », pour « courtes séquences palindromiques répétées, groupées et régulièrement espacées »), à la suite de la publication d'un article par Mmes Emmanuelle Charpentier et Jennifer Doubna, en 2012, dans la revue scientifique américaine Science. Mme Catherine Procaccia y reviendra.

Se pose alors la question des potentialités et des craintes liées à CRISPR-Cas9 et des autres nouvelles biotechnologies. La technique a évolué tellement rapidement qu'il est essentiel que le Parlement s'en saisisse dès maintenant.

Les biotechnologies se développent depuis maintenant cinquante ans, après la découverte de la double hélice de l'acide désoxyribonucléique (ADN) par Watson et Crick en 1953, puis du code génétique par Niremberg en 1962 et, ensuite, de la transgénèse (possibilité de transférer un gène d'une bactérie à une autre) par Schapiro en 1971.

L'essor des techniques de modification ciblée du génome (genome editing) date du début des années 2000.

Le comité scientifique du Haut Conseil des biotechnologies (HCB), dans un avis remis à la Commission européenne, le 16 janvier 2016, a établi une typologie de ces nouvelles techniques : nucléases dirigées, mutagénèse dirigée par oligonucléotides, techniques exploitant les mécanismes épigénétiques… On pourrait ajouter à la liste du HCB deux techniques nouvelles prometteuses, confirmées et largement utilisées depuis des années dans le domaine des biotechnologies : la PCR (Polymerase Chain Reaction), soit la possibilité d'amplifier des parties du génome, et la GFP (Green Fluorescent Protein), protéine émettant une fluorescence verte.

On distingue trois techniques de modification ciblée du génome dénommées « SDN » (Site-Directed Nuclease) : SDN1 (on coupe un morceau et on laisse l'ADN se réparer tout seul), SDN2 (on coupe et on remplace par un morceau équivalent de la même espèce) et SDN3 (on coupe et on remplace par une séquence provenant d'une autre espèce). Dans ce dernier cas, il s'agit de transgénèse effectuée de manière différente.

Quatre générations de nucléases se sont succédées : les méganucléases, qui étaient trop compliquées et ne sont plus maintenant utilisées ; les nucléases à doigt de zinc, qui ont été utilisées pour un essai contre le SIDA, qui sont encore utilisées mais qui ne fonctionnent pas avec tous les organismes vivants ; les TALE (Transcription Activator-Like Effector) nucléases, encore utilisées mais avec un processus long et coûteux ; et enfin, en 2012, l'apparition d'une nouvelle technique, CRISPR-Cas9, qui représente une véritable révolution.

Je laisse maintenant Mme Catherine Procaccia vous en parler.

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