Intervention de Bernard Accoyer

Séance en hémicycle du 30 janvier 2013 à 15h00
Projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Accoyer :

Pourquoi refuser, madame la garde des sceaux, ce grand débat qu'exige légitimement un texte à portée éthique et sociétale ?

Pourquoi, monsieur le président de l'Assemblée nationale, avoir refusé la création d'une commission spéciale, alors que c'est une tradition dans cette grande institution que, pour les textes éthiques et les textes de société on procède ainsi ? C'était d'ailleurs le cas en 2011 pour la loi sur la bioéthique.

En outre, pourquoi ne pas avoir choisi la procédure du temps législatif programmé, qui avait justement été appliquée pour l'examen de cette loi en 2011 ? Cette procédure avait d'ailleurs été saluée par votre groupe à l'époque, tout simplement parce qu'elle permet de développer longuement les arguments sans être sous la pression du chronomètre que vous-même, monsieur le président, et les autres présidents de séance devrez manipuler en coupant la parole toutes les deux minutes, à la fin du temps réglementaire, lorsque l'opposition exposera ses arguments.

On le voit, toute une série de choix s'additionnent qui visent à éviter le débat, à ne pas permettre qu'on puisse entrer pleinement dans le débat. Franchement, c'est une occasion manquée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mais au-delà de cette occasion manquée, ce projet de loi est surtout celui de la confusion.

Il y a d'abord confusion quant au nom du texte proposé, qui porte « ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe » alors que vous parlez, madame la garde des sceaux, chers collègues de la majorité, du « mariage pour tous ». En réalité, vous avez là un slogan.

La confusion est également de nature anthropologique, entre le genre et l'orientation sexuelle.

Mais la confusion porte surtout sur la portée du projet de loi, car le mariage, dans le code civil, ce n'est pas que l'union d'un homme et d'une femme. C'est également la filiation, la présomption de paternité ; c'est automatiquement le droit à l'adoption et, pour les couples stériles, l'accès à la procréation médicalement assistée. Et ce qui est caché, ce qui n'est pas dit suffisamment clairement et que le débat aurait mis en évidence – ç'aurait été une avancée considérable –, c'est que si ce texte est voté, si le mariage de deux personnes de même sexe est à l'avenir rendu possible, alors automatiquement ces couples auront droit non seulement à l'adoption mais aussi à la procréation médicalement assistée, au besoin en passant par le biais d'une question prioritaire de constitutionnalité.

En effet, comment le Conseil constitutionnel pourrait-il considérer qu'il y aurait égalité de droits entre tous les couples mariés si certains d'entre eux peuvent avoir accès à la PMA et d'autres non ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

L'étape suivante verra surgir la même revendication, suivant la même procédure de la question prioritaire de constitutionnalité : les couples composés de deux hommes demanderont, s'appuyant sur le fait qu'un couple formé de deux femmes a accès à la PMA, à avoir eux-mêmes accès à un moyen d'avoir des enfants ; et ce sera évidemment, mécaniquement, l'accès à la gestation pour autrui. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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