Intervention de Bernard Cazeneuve

Réunion du 5 avril 2016 à 18h00
Commission des affaires étrangères

Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur :

Je n'ai pas changé de discours sur la question : la constance et la précision comptent. À chaque fois que vous m'avez interrogé, j'ai répondu que l'idée de Nicolas Sarkozy, lorsqu'il a signé l'accord du Touquet, qui consistait à envoyer le signal du caractère infranchissable de la frontière, me paraissait juste compte tenu de ce qu'était alors la situation. Je n'ai pas changé d'avis. Ensuite, j'ai indiqué que cet accord, qui conduisait la France à gérer la frontière franco-britannique, était déséquilibré dans le sens où nous en assumions seuls, y compris sur le plan financier, la charge. Ma démarche a donc été de demander aux Britanniques de nous accompagner financièrement et en moyens humains, ce qu'ils ont fait en engageant les moyens que j'ai précédemment indiqués. Par ailleurs, ce n'est pas parce que nous gérons la frontière en France que les mineurs isolés ou que les migrants qui ont des relations au Royaume-Uni ne doivent pas y bénéficier de l'asile. Nous avons négocié avec les Britanniques et sommes parvenus à obtenir les réponses que nous attendions, même si elles doivent être amplifiées.

Vous avez raison, madame Fourneyron, il existe d'autres ports d'où l'on peut partir pour le Royaume-Uni. J'ai donc donné des instructions très claires pour qu'on ne laisse pas s'y installer des campements et pour qu'on procède à l'étanchéification de la frontière dans ces autres ports où l'OFPRA et l'OFII sont chargés d'aller chercher les migrants pour leur proposer le même dispositif qu'ailleurs. Je ne souhaite pas, en effet, que le problème se déplace mais bien qu'il soit résolu sur la totalité de la façade septentrionale. Je me souviens que lorsqu'on a démantelé le centre de Sangatte, non pas en installant les migrants dans des structures d'accueil pour leur proposer l'asile mais en les dispersant, certains, à Cherbourg dont j'étais maire à l'époque, dormaient dans des cartons. Quand j'ai alors demandé qu'on accompagne la collectivité locale pour faire face à cette réalité qui n'était pas de son ressort, l'État n'avait pas eu le même comportement qu'aujourd'hui où il prend ses responsabilités.

M. Loncle souhaite savoir, pour sa part, comment nous établissons la différence entre les réfugiés et les migrants économiques. Il y a des migrants économiques à Calais, même s'ils sont moins nombreux qu'ailleurs. Quand des migrants essaient de passer, nous procédons à la reconduite de ceux qui ne relèvent pas du statut de réfugié. Nous avons procédé, depuis le début de l'année, à une cinquantaine de reconduites par semaine, à savoir quelque 500 migrants économiques irréguliers depuis le début de l'année.

Comment, ensuite, rééquilibrer la communication ? Il faut être rigoureux, honnêtes, persévérants ; il faut également garder son calme car on entend parfois des choses susceptibles de nous mettre en colère. Il faut aussi nommer les choses quand les limites sont dépassées. Enfin il faut des relais. Je ne vous demande pas de croire ce que je dis mais de le vérifier en allant à Calais, à Grande-Synthe, dans les CAO, en contrôlant l'action de mes services et, si ce que je dis n'est pas vrai, eh bien, vous le signalerez. Je le répète, je suis demandeur d'une telle coopération avec le Parlement car il peut très bien y avoir des points à améliorer.

J'en viens à l'intervention de Mme Dagoma. Nous avons décidé de mettre en place le guichet unique, il y a quelques semaines, après le vote de la loi relative à la réforme du droit d'asile. Il est vrai que la situation reste particulière dans la région parisienne du fait de la concentration de difficultés dans quelques préfectures. Nous avons obtenu des moyens supplémentaires à cet effet dans le cadre des mesures prises par le Gouvernement pour faire face à la crise migratoire.

Pour ce qui concerne l'ADA, nous rencontrons des difficultés de mise en oeuvre même si, globalement, la montée en puissance du dispositif se passe dans de bonnes conditions. Aujourd'hui, plus de 85 000 personnes en bénéficient, ce qui n'est pas négligeable.

En ce qui concerne le service civique, son principe veut que le jeune choisisse lui-même son projet. Aussi, si certains décident de s'engager à Calais, non seulement ils pourront le faire mais l'administration les accompagnera. Reste que le ministère de l'intérieur n'est pas à même d'offrir des postes à cette fin, à moins de dénaturer l'esprit du dispositif lui-même.

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