Intervention de Marie-Noëlle Battistel

Réunion du 26 avril 2016 à 17h15
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Noëlle Battistel, rapporteure :

Monsieur Jean Grellier, je partage les propos que vous avez tenus et les questions que vous vous posez encore. Les multiples informations que nous avons eues lors de nos auditions nous ont conduits à chaque fois à nous interroger un peu plus. Si Monsieur Philippe Armand Martin considère que le principe de l'effacement diffus est assez simple puisqu'il suffit d'appuyer sur un bouton, les choses se compliquent quand il s'agit de mesurer son incidence sur le réseau et de savoir comment capter cette ressource et la valoriser.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, des entreprises innovantes développent des dispositifs de home management. Demain, on pourra, grâce à une application, arrêter son chauffage quand on part en vacances et le rallumer à distance avant d'arriver chez soi pour optimiser les économies d'énergie. Cela se traduira par des économies sur la facture d'électricité, ce qui n'est pas forcément le cas aujourd'hui avec le modèle actuel d'effacement. Les personnes que nous avons auditionnées nous ont dit en effet que le système actuel engendrait assez peu d'économies d'énergie. Il faut traiter la question du report de consommation lorsque l'on a effacé. Comment mesurer ce report ? Doit-on reporter la totalité à un instant t + 2 heures ou t + 24 heures ? Le rebond ne neutralise-t-il pas l'économie réalisée ? On entend par rebond la surconsommation engendrée par exemple par un radiateur que l'on rallume après avoir été éteint pendant trente minutes. Aujourd'hui, on n'a pas l'assurance d'avoir une vraie réponse à ces questions puisque les méthodes de calcul sont encore en cours. C'est pourquoi nous préconisons de ne pas se précipiter dans des dispositifs dont les effets ne sont pas encore clairement connus aujourd'hui. En matière de stockage, les progrès sont très rapides et peuvent contribuer assez rapidement à compléter ce bouquet d'outils dont nous disposons – efficacité énergétique, économies d'énergie, innovation et effacement tarifaire.

J'en viens au compteur Linky qui est contesté sur un autre plan. Ce compteur permet actuellement de proposer des offres tarifaires intéressantes, donc de l'effacement tarifaire. Il indique au consommateur que de telle heure à telle heure on est en période de pointe, donc que l'électricité coûte très cher à ce moment-là. C'est un peu le même esprit que l'option tarifaire « Effacement jour de pointe » (EJP) dont certains d'entre vous se souviennent certainement. Pourquoi ne pas imaginer demain que le consommateur devienne acteur de sa consommation en la réduisant quand le compteur Linky lui indiquera qu'à tel moment le courant va lui coûter cher ? Ainsi, l'effacement se ferait de manière opérationnelle par le consommateur. Mais on n'en est pas encore là. Le déploiement qui est en cours permettra de relever les compteurs à distance, d'équilibrer le réseau, etc. mais pas d'effacer. Il faudra qu'il y ait un opérateur d'effacement qui branche ce compteur pour pouvoir le faire.

Monsieur Antoine Herth, combien de compteurs intelligents faut-il pour que l'effacement diffus devienne un élément significatif pour la gestion des réseaux ? Je ne peux pas vous répondre précisément. Il en faut beaucoup car l'effacement diffus ne sera efficace que s'il est de masse. Ce n'est pas encore pour tout de suite...

Avec un prix de marché de 23, 24 ou 25 euros, effacer n'est pas du tout rentable. Aussi, on peut se demander s'il faut inciter massivement aujourd'hui des dispositifs qui ne sont pas viables économiquement. Voilà pourquoi nous préconisons de ne pas se presser, d'attendre que des progrès soient faits et que les appels d'offres et les dispositifs qui ont été introduits dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte montrent leurs effets avant de progresser. Cela dit, il ne faut pas tuer cette filière parce que, même si elle n'est pas viable aujourd'hui d'un point de vue économique, elle peut être utile demain pour intégrer les énergies intermittentes qui vont arriver sur les réseaux de manière massive, comme le prévoit cette loi. Pour gérer ces arrivées, peut-être faudra-t-il parallèlement utiliser les effacements à la fois tarifaires et diffus qui auront alors un vrai rôle à jouer sur le marché.

Bien évidemment, nous travaillons pour que l'effacement diffus soit bénéfique pour le consommateur. Toutefois, cet effet n'est pas encore réellement prouvé. Si l'effacement tarifaire constitue un vrai bénéfice pour le consommateur, c'est moins évident pour l'effacement diffus, surtout en raison des prix de marché actuels.

Monsieur Philippe Armand Martin m'a interrogé sur le conflit entre Voltalis et EDF et m'a demandé ce que représente le coût de rachat de l'effacement diffus en 2015. Il est ridicule, voire nul, parce que le système ne fonctionne pas avec les anciens outils. Et nous ne connaissons pas encore les effets des nouveaux dispositifs qui ont été introduits dans la loi. Les appels à projet n'ont en effet pas encore montré leurs effets positifs ou négatifs. Aussi, je ne saurais vous répondre. Mais si vous le souhaitez, nous enquêterons plus précisément et je vous donnerai personnellement une réponse.

Madame la présidente, j'espère avoir répondu à l'ensemble des orateurs.

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