Intervention de Catherine de Salins

Réunion du 26 avril 2016 à 17h00
Commission des affaires sociales

Catherine de Salins :

Je vous remercie pour votre accueil, pour vos encouragements et pour les nombreuses questions que vous m'avez posées, témoignant de l'intérêt que vous portez à l'agence.

Plusieurs questions ont porté sur l'adéquation entre les missions de l'ANSM et les moyens qui lui sont alloués. L'exécution des budgets passés laisse penser que l'agence a, jusqu'à présent, disposé de moyens suffisants. Cela dit, nous devons être vigilants car la subvention versée par l'État a été considérablement réduite et le fonds de roulement de l'agence, qui lui avait initialement permis d'amortir cette baisse, va se trouver intégralement consommé : il importe donc de ne plus réduire le montant de la subvention, d'autant que les missions de l'agence sont de plus en plus nombreuses et font l'objet d'une réorganisation se traduisant, elle aussi, par un coût important. En tant que présidente du conseil d'administration, j'entends porter une attention particulière à ce point.

J'ai pris bonne note des préoccupations exprimées par M. Bapt au sujet des structures de l'agence et la capacité à les faire évoluer, ainsi que sur la bonne information des administrateurs.

Les représentants des associations de patients et d'usagers disposent aujourd'hui de deux sièges au conseil d'administration de l'agence. Les associations peuvent également s'exprimer par le biais des comités de liaison, et participent à certains groupes de travail de l'agence. Pour ce qui est des garanties relatives à l'indépendance des représentants des associations, je précise que ces représentants déposent, comme tous les membres du conseil d'administration, une déclaration publique d'intérêts consultable sur le site de l'ANSM. Par ailleurs, lorsqu'une association d'usagers participe à un groupe de travail ou à une commission de l'agence, c'est non seulement la personne participant aux travaux qui doit déposer une DPI, mais aussi l'association elle-même, ce qui permet notamment de savoir si ses financements proviennent d'une entreprise.

Pour ce qui est des relations entre les associations et les industriels du médicament et des produits de santé, la loi de décembre 2011 a cherché à rompre tout lien pouvant conduire à mettre en doute l'indépendance de l'agence par rapport à ces entreprises. Il me paraît essentiel de rester dans ce schéma, afin que l'agence ne puisse être soupçonnée de prendre une décision dans le but de complaire à tel ou tel laboratoire. Pour autant, cela ne signifie pas que l'agence doive s'interdire toute relation avec les industriels : lorsque ceux-ci veulent déposer une demande d'autorisation de mise sur le marché, par exemple, ils le font par l'intermédiaire d'un comité de liaison. Il faut en fait trouver le juste équilibre entre l'indépendance et la nécessité de communiquer.

J'ai également été interrogée au sujet de la capacité de l'agence à disposer d'une expertise de qualité. La loi de 2011 a essayé de trouver un équilibre entre la nécessité d'éviter tout conflit d'intérêts, qui rendrait les décisions illégales et amoindrirait la confiance que l'on peut avoir dans l'agence, et la qualité de l'expertise apportée. Il me semble que cet équilibre doit être préservé, et qu'il sera intéressant de procéder prochainement à une évaluation sur ce point. La Cour des comptes a rendu récemment un rapport portant sur le respect des obligations de déclaration d'intérêts, mais il me semble important que la capacité d'expertise de l'ANSM et des autres agences fasse, elle aussi, l'objet d'une évaluation dont le législateur devra éventuellement tirer les conséquences.

Il existe effectivement en France une multitude d'agences compétentes dans le domaine de la santé, dont les missions respectives se recoupent parfois, que ce soit dans le domaine des vaccins, par exemple, ou de l'appréciation de l'apport des médicaments et des produits de santé. L'ANSM est signataire de conventions et veille à intervenir en association avec les autres agences. Pour ce qui est de l'architecture générale, j'y vois une question relevant de la responsabilité du législateur – et n'étant pas encore en poste, je ne m'estime pas en mesure de vous indiquer si un rapprochement avec telle ou telle autre agence est souhaitable.

Madame la présidente, vous m'avez posé une question sur la place de la France au sein de l'Agence européenne des médicaments. Le projet stratégique de l'agence prévoit le renforcement de son rôle : en tant que présidente, je m'efforcerai de faire en sorte que l'ANSM joue un rôle central au sein de l'EMA, car c'est là que se prennent les décisions importantes en matière d'autorisation des nouveaux médicaments – ou de modification d'une AMM, justifiée par les informations recueillies dans le cadre de la pharmacovigilance.

Plusieurs questions ont porté sur les produits cosmétiques. Je ne suis pas en mesure de vous dire si ces produits devraient ou non être soumis à une autorisation de mise sur le marché. Ce qui importe, c'est que l'agence exerce sa mission d'évaluation, de surveillance, de contrôle et d'inspection de ces produits. La presse a rapporté récemment que, dans ce cadre, l'agence avait suspendu la mise sur le marché, la commercialisation et la fabrication de produits provenant d'un site de fabrication d'un laboratoire. Il appartient au législateur de déterminer s'il faut aller plus loin en soumettant les produits cosmétiques à une AMM.

En matière de médicaments génériques, l'agence procède également à des contrôles. C'est de cette manière qu'elle rassure nos concitoyens : en leur montrant que s'il y avait un problème, des mesures seraient immédiatement prises – et que s'il n'y en a pas, c'est que les génériques peuvent être utilisés en toute confiance.

Pour ce qui est des essais cliniques de Rennes, je ne dispose que des informations diffusées dans la presse, qui ne me permettent pas de dire ce qui s'est passé. Cette affaire exceptionnelle doit donner lieu à une analyse très précise du schéma de prise de décision. En ce qui concerne la molécule elle-même, des analyses ont déjà été effectuées par le Comité scientifique temporaire que l'agence a mis en place. Parallèlement, une mission de l'IGAS va rendre prochainement son rapport, et le juge est saisi. La réflexion doit se poursuivre au niveau de l'Agence européenne des médicaments et de nos partenaires européens – puisque les règles de déroulement des essais cliniques sont définies par un règlement européen –, afin que les processus de définition des essais cliniques soient les plus sûrs possibles pour les volontaires, mais aussi pour que les résultats obtenus à l'issue des tests soient concluants et fiables.

Il ne m'appartient pas de me prononcer sur la publicité des débats au sein du Comité économique des produits de santé. Pour ce qui est de l'agence, elle débat de questions couvertes pour partie par le secret des procédés, ce qui empêche de rendre les débats complètement publics. Cela dit, il est important que, dans le respect des secrets protégés par la loi, l'agence continue à communiquer sur les processus de contrôle auxquels elle a recours et les décisions qu'elle prend, et qu'elle informe ses partenaires, à savoir les professionnels de santé – pharmaciens, médecins – et les usagers de la façon la plus pédagogique possible. La sécurité sanitaire est une mission qui incombe à l'agence, mais qui repose aussi sur une chaîne d'acteurs, à la fois professionnels de santé et patients : pour cette raison, il est important que chacun dispose de la meilleure information possible. L'ANSM a conçu une base de données disponible sur Internet, sur laquelle on peut trouver des informations sur tous les médicaments et qu'elle va continuer à alimenter et actualiser, tout en faisant en sorte qu'elle soit la plus accessible et la plus lisible possible.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion