Intervention de Jacky Chorin

Réunion du 27 avril 2016 à 9h30
Commission des affaires économiques

Jacky Chorin, FO :

Nous souscrivons entièrement à ce qui vient d'être dit. Étant administrateur d'EDF, je suis tenu à une certaine réserve, mais je tiens à dire deux ou trois choses.

En 2004, d'entreprise quasi unique, EDF-GDF a été éclatée en neuf sociétés : la maison mère EDF, ENGIE, les deux entreprises de distribution ERDF et GRDF, les deux entreprises de réseau RTE et GRTgaz, et, s'agissant du gaz, Storengy pour le stockage, LNG pour les terminaux méthaniers et ENGIE exploration-production. Cette désoptimisation du système, pour un coût de plusieurs milliards d'euros, s'est faite sans que la France soit plongée dans le noir, je tiens à le souligner. Mais pour quel bénéfice ? Aujourd'hui, ENGIE abandonne le gaz, alors qu'elle avait été privatisée pour faire du gaz, EDF se trouve dans la situation qui vient d'être décrite. Le ministre Nicolas Sarkozy avait pourtant assuré que jamais EDF et Gaz de France ne seraient privatisées…

Je tenais à remettre les points sur les « i » à ceux qui font procès aux salariés de ne pas vouloir bouger. Les salariés ont vécu tout cela, ils ont défendu leurs entreprises, ils ont fait le maximum pour que ces entreprises fonctionnent dans un contexte d'ouverture de marché à laquelle ils ne croyaient pas. Malheureusement, ils ont eu raison : cela ne marche pas. La preuve en est qu'il y a des prix administrés partout, des subventions aux énergies renouvelables au marché de capacité, et autres. Quand se rendra-t-on compte que tout cela est un échec ?

Voyez le bilan : cette première phase devait permettre à EDF de faire du gaz ; EDF a fait peu de gaz et aujourd'hui ce n'est plus le sujet. Quant à ENGIE, ex-Gaz de France, elle fait maintenant de l'électricité.

Aujourd'hui, on entre dans une phase différente qui consiste à casser EDF en morceaux. C'est bien de cela qu'il s'agit avec la sortie de RTE du groupe EDF. Il en est de même des sociétés d'économie mixte (SEM) hydrauliques : même avec des capitaux publics, les accords les concernant ont toujours été lus comme une sortie d'EDF. Et au niveau du nucléaire, M. Alexandre Grillat a posé la bonne question : parlera-t-on, demain, de nucléaire de France ou de nucléaire anglais ? Ajoutons à cela le changement de nom d'ERDF, exigé par le président de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), qui pèse 300 millions d'euros dans les comptes d'EDF. Là encore, où est le bénéfice ?

EDF perd des clients parce que la France a décidé, avec la loi NOME de 2010, l'abandon des tarifs réglementés pour les industriels et les commerçants au 31 décembre 2015. Une telle mesure n'est appliquée nulle part ailleurs, sauf au Danemark. Et je ne parle pas des mesures l'obligeant à aider ses concurrents. Ce qu'il y a de formidable avec les prix de marché, c'est que quand ils sont bas, les concurrents font ce qu'ils veulent, mais quand ils sont hauts, les mêmes concurrents viennent pleurer et obtiennent l'ARENH ou le tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché (TaRTAM). Au final, un système dans lequel EDF est seule à prendre des risques aboutit à la situation que vous connaissez. À force de taper sur l'opérateur historique à coup de mesures exorbitantes, les effets commencent à se faire sentir !

Nous avons combattu l'introduction de l'entreprise en bourse, que même le ministre Emmanuel Macron considère comme une mauvaise idée – preuve que les conversions tardives peuvent être utiles.

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