…que les salariés, les syndicats et les patrons ont la compétence de se mettre collectivement d’accord, malgré des intérêts divergents. D’ailleurs, plusieurs mouvements actuels revendiquent le fait que l’expertise n’appartient pas seulement au monde politique et administratif, qu’elle doit aussi impliquer les citoyens et, en l’occurrence, les salariés. C’est pourquoi, depuis 2012, notre majorité a promu le dialogue social comme méthode pour engager des réformes structurelles. Car les changements nécessaires à la période de mutation économique actuelle ne peuvent être acceptés que par la conclusion de compromis négociés et assumés. Et faire le pari du dialogue social pour conduire le changement dans le champ de l’économique et du social permettra de trouver des solutions nouvelles, équilibrées et durables.
Ce dialogue social est nécessaire parce que le marché ne suffit pas à réguler l’économie, parce que les employeurs ne suffisent pas à réguler l’entreprise, et parce que le suffrage universel ne suffit pas à réguler la démocratie.
Certes, on peut regretter qu’en France, à la différence du « modèle allemand », domine encore trop souvent une culture où les partenaires sociaux sont peu enclins à se reconnaître mutuellement et se retrouvent ainsi dans l’incapacité de trouver des compromis pour préserver l’emploi des salariés et la compétitivité des entreprises. Mais les choses bougent, et le présent projet de loi y contribuera. D’autant que, contrairement à ce qui est annoncé comme une régression sociale, le projet de loi comporte des avancées sociales significatives, comme le compte personnel d’activité, qui établit des droits attachés aux personnes plutôt qu’au statut.
Depuis son dépôt, le texte a déjà été profondément modifié sur plusieurs aspects essentiels. Je souhaite, pour finir, en évoquer un qui me tient particulièrement à coeur. En juillet dernier, j’avais déposé une proposition de loi relative aux droits à congés. Les deux dispositions de cette proposition de loi ont été adoptées par amendements lors de l’examen du texte en commission des affaires sociales et sont donc désormais intégrées au projet de loi.
D’abord, tirant les conséquences d’une décision récente du Conseil constitutionnel, la perte de congés payés en cas de licenciement pour faute lourde est supprimée, car elle constituait une rupture de l’égalité des salariés devant la loi. Ensuite, les effets de la période de référence ont été assouplis par une précision indiquant que les salariés ayant acquis des droits à congés peuvent prendre lesdits congés « dès leur embauche ». Cet assouplissement ne supprime pas la période de référence, qui permet une gestion collective plus simple des ressources humaines, mais il a pour objectif d’éviter aux salariés un temps de présence parfois long dans l’entreprise avant de pouvoir bénéficier des premiers congés, ne serait-ce que parce que pour travailler bien, il faut récupérer mieux.