Intervention de Barbara Pompili

Séance en hémicycle du 31 janvier 2013 à 9h30
Coprésidence paritaire pour les groupes politiques — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Monsieur le président, monsieur le ministredélégué chargé des relations avec le Parlement, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui une proposition de résolution visant à modifier le règlement de l'Assemblée nationale, co-signée par l'ensemble des membres du groupe écologiste.

Ce faisant, nous souhaitons simplement que la décision que le groupe écologiste a prise dès sa constitution, en juin 2012, de porter à sa tête M. François de Rugy et moi-même, soit reconnue comme légitime, et que la liberté d'organisation des groupes, censée fonder notre fonctionnement collectif, soit reconnue pleinement, et non pas seulement tolérée car, dans sa rédaction actuelle, le règlement de l'Assemblée ne connaît qu'un seul et unique président. La conséquence est double.

D'une part, le fonctionnement de cette coprésidence informelle n'est possible en pratique qu'en « bricolant », en marge du règlement – ce qui n'est pas très satisfaisant et pourrait un jour être source d'incertitude juridique. D'autre part, en droit strict, les groupes qui souhaitent être coprésidés sont contraints de s'en remettre à un pis-aller : la présidence alternée. Ainsi, au plan juridique, seul François de Rugy a été président du groupe écologiste jusqu'au 14 janvier 2013, date à partir de laquelle je lui ai succédé.

Notre proposition de résolution, qui reconnaît un droit nouveau aux groupes, sans rien imposer, permettrait donc de remédier à cette situation et, au-delà du seul groupe écologiste, de promouvoir, pour ceux qui le souhaiteront à l'avenir, une culture plus collective de l'exercice du pouvoir.

Il s'agit donc de permettre aux groupes parlementaires de se doter d'une coprésidence paritaire – j'insiste bien sur chacun de ces termes, sur lesquels je vais revenir.

J'ai entendu des collègues de l'opposition avancer que cette proposition serait de convenance, taillée sur mesure, si j'ose dire, pour une composante de l'Assemblée, comme si, finalement, les écologistes étaient des êtres politiques un peu originaux, aux modes de fonctionnement bizarres, pour ne pas dire suspects. (Sourires sur les bancs du groupe écologiste.)

Eh bien, au risque de paraître bizarre, je vous le dis : pour les écologistes, la collégialité dans les fonctions d'animation d'un groupe d'élus n'est pas une attitude de convenance, mais bien une pratique que nous souhaitons voir reconnue comme naturelle. Présider un groupe ou une organisation, c'est avant tout animer, réguler, concerter. À deux, c'est plus efficace, à deux, c'est plus apaisé. (Sourires.) Croyez-moi, chers collègues, notamment du groupe UMP, cela évite aussi bien des psychodrames et des compétitions assassines.

Au risque de paraître bizarre, je vous dis également que la parité, qui fait que notre groupe comporte autant de députés hommes que de députées femmes, n'est pas pour nous une réalité de convenance ou d'affichage, c'est la réponse à un impératif démocratique et social.

Et, pour tout vous dire, ce qui me semble franchement bizarre, c'est que, cinquante-cinq ans après la fondation de la Ve République, je sois la première femme présidente en titre d'un groupe politique à m'exprimer devant vous. Une présidente qui ne vient pas vous faire la leçon, qui ne tire aucun titre de gloire de cette bizarrerie, bien au contraire : non, une présidente qui vient demander que ce statut puisse être, pour ceux qui en feront le choix, tout simplement partagé, et que la parité puisse ne pas être une simple option résultant de situations successives mais bien une réalité permanente.

Nous ne sommes donc pas ici pour exiger de l'Assemblée qu'elle exerce une contrainte quelconque sur ses groupes et nous ne prétendons pas, nous, écologistes, donner l'exemple. Nous sommes ici simplement pour permettre à notre assemblée de démontrer qu'elle est capable d'innovation et de modernité en reconnaissant à ses groupes la liberté dans leur organisation.

Ce texte tend en effet à permettre, non à imposer. La coprésidence serait donc une simple faculté, un droit supplémentaire offert aux groupes parlementaires sur le fondement de la première phrase de l'article 51-1 de la Constitution, laquelle prévoit que « le règlement de chaque assemblée détermine les droits des groupes parlementaires constitués en son sein ».

Cette proposition de résolution ne contraint donc personne et ne remet pas en cause la liberté d'organisation des groupes. Ceux-ci peuvent parfaitement continuer à être dirigés par un seul président ou – ce n'est pas interdit, à défaut d'être une réalité – par une seule présidente.

J'ajoute que cette modification du règlement ne créerait aucune différence de situation entre les groupes puisque ceux qui opteront pour la coprésidence n'obtiendront aucun droit supplémentaire par rapport aux groupes qui ne compteraient qu'un seul président. Par exemple, la coprésidence n'offrira aucun temps de parole supplémentaire, aucun droit de tirage supplémentaire.

L'avantage de ce texte est de préciser ce qu'est une coprésidence. Concrètement, chacun des deux députés à la tête de cette coprésidence aurait les mêmes prérogatives que tout président de groupe.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion