Intervention de Estelle Grelier

Réunion du 18 juillet 2012 à 16h15
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEstelle Grelier, co-rapporteure :

Notre commission est saisie du projet de budget de l'Union européenne pour 2013, qui a été examiné par le COREPER le 11 juillet dernier et sera adopté par le Conseil affaires générales le 24 juillet prochain.

Ce projet de budget, tel que présenté par la Commission européenne début mai, s'élève à 151 milliards d'euros en engagements et 138 milliards d'euros en paiements. La progression des engagements est ainsi calée sur la prévision d'inflation ; tandis que celle des paiements – et c'est bien le problème pour les États membres, est inédite, puisqu'elle est de 6,8 %. Pour la France, elle aurait ainsi pour conséquence un ressaut de sa contribution au budget de l'Union européenne de 1,4 milliard d'euros.

La négociation budgétaire de l'automne prochain présente un intérêt particulier, à double titre.

Il s'agit tout d'abord du dernier budget du cadre financier pluriannuel 2007-2013. Il apparaît donc comme un point de référence pour les négociations du cadre financier pluriannuel 2014-2020. Ces négociations sont en effet entrées dans la dernière ligne droite, avec comme objectif, très ambitieux compte tenu du contexte, d'aboutir d'ici à la fin de l'année. Le budget pour 2013 constitue donc un premier terrain d'affrontements des positions.

En tant que dernier budget du cadre financier pluriannuel 2007-2013, le projet de budget pour 2013 met également en évidence la problématique de l'évolution des crédits de paiement. La fin de la programmation financière est en effet traditionnellement marquée par l'arrivée à leur rythme de croisière des projets soutenus par l'Union et par l'accélération du rythme des paiements des projets. Cette accélération est accentuée en 2013 par le fait que, exceptionnellement, les créances transmises par douze États membres devront être présentées pour deux tranches d'engagement annuelles.

A cette problématique d'accélération du rythme des paiements en fin de programmation s'ajoute celle de l'augmentation continue, ces dernières années, des restes à liquider, c'est-à-dire des engagements qui n'ont pu être honorés faute de crédits de paiement. C'est le vrai sujet des négociations sur le budget pour 2013, qui met par ailleurs en évidence le sous-dimensionnement chronique du budget européen. Alors que le montant des restes à liquider ne cesse de croître, pour atteindre 207 milliards d'euros fin 2011 et, selon les prévisions de la Commission, 230 à 250 milliards d'euros fin 2013, il convient d'étudier l'ensemble des pistes possibles pour y remédier, et pas seulement la pure et simple remise en cause des engagements.

Je souhaiterais par ailleurs souligner le paradoxe qui veut que les États membres se prononcent défavorablement sur les évolutions de crédits de paiement calculées par la Commission sur la base même des estimations fournies par les États membres ! Il n'est pas acceptable que des États en difficulté, comme l'Espagne et la Grèce, soient contraints de faire des avances de trésorerie parce que la Commission européenne n'est plus en mesure de régler les factures à honorer faute de crédits de paiement. Pour reprendre les propos du Président de la commission des budgets au Parlement européen Alain Lamassoure, il ne faut pas que l'argent européen soit de la « monnaie de singe ».

L'arrivée dans la dernière ligne droite de la négociation sur le cadre financier pluriannuel 2014-2020 nous oblige à prendre à bras le corps la question de l'évolution des crédits de paiement et des restes à liquider. Une solution, qui éviterait de peser trop lourdement sur le budget des États, pourrait consister à faire de la taxe sur les transactions financières une des ressources propres du budget.

Dernier budget du cadre financier pluriannuel, le budget pour 2013 est aussi un budget de crise. Aussi, il m'apparaît essentiel que les crédits d'engagement du budget soient axés, de manière prioritaire, sur les programmes liés au thème de la croissance et de l'emploi, dans la lignée du Pacte pour la croissance et l'emploi adopté par le Conseil européen il y a trois semaines. La priorité doit être accordée aux programmes en matière de recherche (7ème PCRD), d'éducation tout au long de la vie, et de compétitivitéinnovation des PME.

Si le budget européen peut servir de levier de croissance, comme soutien à des programmes de recherche ou comme amorce des project bonds, il est utilement complété par d'autres outils, comme la Banque européenne d'investissement.

Compte tenu du contexte budgétaire particulièrement contraint, la France a estimé que le budget 2013 de l'Union européenne devait être raisonnable et orienté vers la croissance et l'emploi. La France ne peut se permettre le ressaut de 1,4 milliard d'euros sur sa contribution généré par le projet présenté par la Commission. Ce n'était pas compatible avec ses objectifs de redressement des finances publiques. Aussi a-t-elle plaidé au Conseil pour une augmentation des crédits de paiement aussi que proche que possible de l'inflation anticipée (1,9 %).

Le compromis finalement adopté prévoit une hausse de 2,79 % des paiements, qui augmente de 600 millions d'euros la contribution de la France au budget européen, et de 1,27 % des engagements. Il préserve largement les dépenses agricoles et assure une progression des dépenses de recherche (hors plan de relance) de 6,13 % en paiements et de 5,5 % en engagements par rapport au budget voté en 2012, conformément aux priorités défendues par la France.

En conclusion, le projet de budget pour 2013 met en évidence les faiblesses du budget de l'Union : un sous-dimensionnement chronique, des difficultés de trésorerie, un niveau systématiquement inférieur à 1,24 % du revenu national brut. J'en appelle donc à la nécessité de surmonter ces difficultés avec la mise en place d'un système de ressources propres abouti ainsi qu'à un contrôle démocratique révisé des outils de financement qui se développent hors du cadre budgétaire classique.

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