Il y a plusieurs raisons à cela.
On a mis en avant la méconnaissance des étudiants. Mais en fait, le problème n'est pas là : s'ils faisaient, au cours de leur cursus, au moins un an de stage en libéral, je peux vous dire que le manque de communication entre la ville et l'hôpital n'existerait plus. C'est cela qu'il faut changer.
Vous dites que la communication ne se fait pas et que l'on attend le big data. Il se trouve que j'ai participé au lancement du dossier médical partagé (DMP) en 2004, parce que j'avais déployé, de mon côté, une messagerie sécurisée avec Apicrypt – qui fonctionnait. M. Jacques Sauret, qui n'était pas encore directeur du groupement d'intérêt public sur le DMP, s'est levé et a déclaré : « dites au ministre Douste-Blazy que nous ne sommes pas prêts ». Mais on serait prêt si, en en-tête des messages que l'on envoie à l'hôpital ou à nos correspondants spécialistes ou hospitaliers, figuraient les allergies, les intolérances, le traitement, une ligne d'antécédents, une ligne de vaccinations et les coordonnées du patient. Dans ces conditions, je peux vous dire que la prise en charge s'en trouverait singulièrement améliorée.
Il faut donc modifier les études, mettre en place une communication simple basée sur la messagerie et supprimer tous les maniaques de l'informatique hospitalière qui ne sont même pas capables de communiquer entre services !
Je vous livre mon expérience : un interne me téléphone pour me parler d'un patient qui a déjà été hospitalisé dans ce même hôpital, pour me demander ce qu'il prend comme médicaments, quelle est sa pathologie, etc. Comme vous l'avez remarqué, certains patients sont poly-pathologiques et vont souvent à l'hôpital. Donc, il m'appelle pour obtenir les renseignements que je lui ai déjà donnés et quand je lui demande son adresse de messagerie où je puisse les lui envoyer directement, il m'indique qu'il faut que je les imprime et que je les lui envoie par télécopie. C'est invraisemblable quand on voit l'argent qui a été dépensé en matière d'informatique hospitalière ! Franchement, les informaticiens d'hôpital, je les mettrais en Sibérie dans les mines de sel !
Mais surtout, il faut que nous, médecins libéraux, ayons le droit de prescrire ce qui est réservé aux médecins hospitaliers. Par exemple, quand je veux maintenir quelqu'un à domicile ou accompagner une fin de vie, je n'ai pas le droit de prescrire de l'Hypnovel : il faut que ce soit un médecin hospitalier qui le fasse. Si je veux traiter un ulcère compliqué à domicile, je ne peux pas utiliser les VAC (traitement par pression négative) parce qu'il faut, soit faire partie d'un réseau, soit que ce soit en HAD. Je ne peux pas prescrire de VAC. Je suis obligé d'hospitaliser mon patient pour qu'il revienne avec le traitement. Ce n'est pas acceptable !
En conclusion, il faut modifier la formation. Il faut veiller férocement à l'argent que vous donnez pour tous ces plans d'informatisation. Quand je pense que l'on parle de relancer le DMP alors que l'on y a déjà englouti 500 millions, je considère que c'est un scandale ! Enfin, il faut nous permettre de prescrire ce qui est réservé aux hospitaliers. Et je peux vous assurer que cela ne coûtera pas cher. Voilà les solutions !