Ecocert est un organisme habilité à contrôler les abattoirs qui produisent de la viande de consommation estampillée « bio ». La règle essentielle du cahier des charges est que les animaux « bio » doivent être abattus avant tous les autres, lorsque la chaîne d'abattage est parfaitement propre. Il faut également pouvoir produire tous les documents afférents lors des contrôles, en particulier le ticket de pesée qui, en comportant la date du jour, l'heure d'abattage et la minute de pesée, permet de vérifier si l'animal est bien passé en premier pour des raisons sanitaires. Par ailleurs, les animaux qui entrent dans les stabulations doivent avoir de l'eau à leur disposition.
En France, tous les abatteurs suivent une formation réglementaire et obligatoire. Dans notre abattoir, elle est dispensée par Adofia, émanation de la Fédération nationale des exploitants d'abattoirs prestataires de service (FNEAP). Cette formation de 48 heures inclut des passages en salle d'abattage où sont expliquées aux personnes les pratiques et les actions correctives en cas de problèmes.
Chaque abatteur dispose d'une fiche de poste qu'il a lue, signée et qu'il connaît par coeur – il ne la consulte donc pas tous les matins en arrivant au travail. Quand vous faites le même travail pendant cinq, dix ou quinze ans, vous êtes censé, comme tout employé modèle qui se respecte, connaître les bonnes pratiques.
Durant la semaine incriminée, le maximum d'heures effectué s'établit à 40 heures. Pour travailler depuis quarante ans dans cet établissement, je peux vous dire que 40 heures d'abattage n'ont rien de rédhibitoires et que l'on est en droit de demander un résultat performant à l'intéressé.
Vous parlez de surcroît d'abattage, mais, pour notre part, nous raisonnons par rapport à des cadences. Effectivement, en cas de cadence trop élevée dans un abattoir, il peut arriver qu'un salarié ait un comportement anormal parce qu'il n'arrive pas à suivre et bâcle les opérations. Cela n'est pas le cas dans notre établissement, car nous adaptons la cadence de la chaîne au nombre de personnes qui y opèrent. Chez nous, le ratio est la production d'animaux par abatteur : notre ratio est de dix agneaux de lait par abatteur ; si l'on juge à l'aune de la moyenne nationale, nous sommes nettement en dessous. Même en tournant à 120 bêtes à l'heure avec douze abatteurs sur la chaîne, vous faites le travail correctement, y compris en termes de protection animale.
Chez nous, tout le monde tourne. Sur la vidéo, vous voyez trois personnes, mais si la vidéo avait été tournée la semaine suivante, vous en auriez vu trois autres. Nous faisons tourner les gens car, parallèlement au bien-être animal, nous tenons compte du bien-être social. Nous incitons nos abatteurs – nous obligeons même certains – à tourner pour leur éviter des opérations répétitives : c'est ce qui explique que nous n'ayons jamais été confrontés à des apparitions de troubles musculosquelettiques. Un abatteur décontracté et content en arrivant le matin au travail aura de bons résultats, aussi bien en termes de bien-être animal que de prestation de service – que je pourrai facturer d'autant plus facilement qu'elle aura été de qualité. À l'inverse, des tâcherons ne pourront pas officier pendant plus de quinze ans : après, ils sont cuits.