Intervention de Bertrand Pancher

Séance en hémicycle du 17 mai 2016 à 15h00
Ratification de l'accord de paris — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

Peut-on vraiment espérer que tous les États joueront le jeu et prendront la réelle mesure des attentes de la société civile ? Rien n’est moins sûr. Certes, la question de la transparence sera au coeur des prochains travaux des États parties, car chacun d’entre eux devra rendre des comptes sur ses engagements, mais tout le monde s’accorde à penser que cela ne sera sans doute pas suffisant : sans mécanisme de sanction ou de régulation, sans aide ni contrainte, il est à craindre, une fois de plus, que cet accord reste à l’état de déclaration.

Que dire, encore, d’un texte qui élude la question du financement ? Car si le Fonds vert doit permettre d’aider les pays du Sud à amorcer leur transition énergétique, aucun outil n’a été prévu pour le long terme. Or, nous le savons tous, de nombreux pays dits « développés » ont montré une certaine réticence à consacrer des moyens financiers importants en faveur des pays vulnérables. La coopération est pourtant l’une des principales clés de la lutte contre le changement climatique.

Je souhaite évoquer maintenant nos territoires ultramarins, qui concentrent l’essentiel de notre biodiversité et ne doivent pas être mis de côté dans ce long processus de transition écologique. La Nouvelle-Calédonie pourrait d’ailleurs être soumise à cet accord, ce qui n’avait pas été le cas lors pour le Protocole de Kyoto, en 1997. C’est une étape nécessaire lorsque l’on sait que les îles du Pacifique sont les premières victimes du changement climatique.

Que dire, enfin, d’un accord qui n’a pas permis de déterminer un prix du carbone, pourtant très attendu, notamment par les acteurs non étatiques – dont l’engagement est au demeurant une bonne nouvelle –, et qui, pour parfaire le tout, a fait l’impasse sur les énergies renouvelables ?

Ce manque flagrant d’ambitions réelles de l’accord de Paris nous met finalement face à deux réalités : d’abord, l’Europe s’obstine à ne pas prendre le leadership mondial, ce qui se traduit notamment par son incapacité à instaurer un véritable marché du carbone ; pire, elle émet des contre-signaux à une politique d’ampleur pour le climat. Ainsi, la récente communication de la Commission européenne intitulée « La voie après Paris » fixe une trajectoire peu ambitieuse, demandant aux États membres de se cantonner aux objectifs du paquet énergie-climat 2030. Comment se résoudre à voir l’Europe, première économie mondiale, baisser ainsi les bras ? C’est inconcevable !

Ce manque d’ambition dénote aussi l’incapacité de la France à prendre le leadership européen. Et pour cause : notre pays n’a cessé, ces cinq dernières années, de prendre un retard considérable dans la transition énergétique, et ce n’est pas la pseudo « grande loi de transition énergétique » qui y changera grand-chose. Je pense bien sûr aux trois piliers d’une transition réussie : le logement et la rénovation de logements, en berne ; les transports, n’en parlons pas ; les énergies renouvelables, dont le développement a été délaissé. Je pense aussi à la version édulcorée de la programmation pluriannuelle de l’énergie que vous avez présentée, madame la ministre. Pourquoi avoir attendu la fin du quinquennat pour commencer à mettre en place des actions précises, qui n’entreront pas en vigueur tout de suite ? Pourquoi avoir osé si timidement quelques faibles avancées, notamment en matière d’instauration de mécanismes de régulation de marché ?

Et que dire des engagements du Gouvernement, relégués au placard, en matière d’aide au développement ? Après avoir promis d’aboutir à 0,7 % du revenu national consacré à l’aide au développement, nous n’en sommes finalement qu’à la moitié et les timides avancées de la taxe sur les transactions financières ne servent finalement qu’à combler le trou sans fond de l’État.

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