Intervention de Ghislain Zuccolo

Réunion du 11 mai 2016 à 16h30
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Ghislain Zuccolo, directeur général de l'association WelfarmProtection mondiale des animaux de ferme :

Prendre en exemple les abattoirs où les choses se passent bien peut effectivement aider à mettre fin à l'immobilisme, et c'est la stratégie mise en oeuvre par Welfarm. Nous nous efforçons d'avoir une communication positive, en attirant l'attention du public sur le fait qu'il existe, à côté de l'élevage intensif, d'autres formes d'élevage mettant en oeuvre des méthodes plus respectueuses du bien-être animal.

En tant que représentant d'une association de protection animale, vous comprendrez qu'il me soit difficile, vis-à-vis de nos membres et donateurs, de reconnaître qu'il existe des abattoirs où les choses se passent bien. Nous assumons cependant le fait de travailler avec certains abatteurs qui, selon nous, font mieux que d'autres en matière de bien-être animal.

Pour ce qui est de la conception des abattoirs et du matériel utilisé, l'éthologie a malheureusement été le parent pauvre des sciences du bien-être animal en France : pendant longtemps, on s'est presque exclusivement référé à la science vétérinaire, à la neurophysiologie et à d'autres disciplines. Aux États-Unis, on s'inspire beaucoup des travaux de Temple Grandin, un docteur en sciences animales qui a aidé McDonald's et d'autres grandes entreprises de l'agroalimentaire à concevoir des abattoirs. J'ai eu l'occasion de la rencontrer et d'évoquer avec elle les difficultés constatées sur les marchés aux bestiaux ; à ce sujet, elle m'a dit qu'il fallait sans cesse compter : compter le nombre de fois où les animaux chutent à un endroit donné, le nombre de beuglements, etc. – un nombre anormalement élevé signalant un problème à résoudre.

La bouverie est effectivement un endroit où il est intéressant de placer des caméras, car le déchargement des animaux est souvent problématique. En 2005, dans un abattoir de porcs, nous avons repéré un employé qui, resté seul le soir, faisait chuter les porcs d'une hauteur de plus d'un mètre en leur donnant des coups de pied. Il arrive aussi que des transporteurs apportant des animaux à l'abattoir le soir, après la fermeture, profitent d'être seuls pour se livrer à des exactions. La vidéosurveillance est de nature à décourager de tels agissements.

Comme l'a dit Agathe Gignoux, il nous arrive de travailler en commun : cela a été le cas lorsque nous avons adressé une lettre commune au ministre de l'agriculture.

Classer les abattoirs en fonction de la façon dont ils prennent en compte le bien-être animal me semble une bonne idée, même s'il est effectivement délicat d'en faire un outil de communication auprès des consommateurs : j'y vois plutôt un indicateur permettant aux abattoirs eux-mêmes de se positionner les uns par rapport aux autres, et les incitant à progresser s'ils sont mal classés.

Si la Déclaration universelle des droits de l'animal a été proclamée dans l'enceinte de l'UNESCO, ce n'est pas pour autant une déclaration officielle de cette institution. En revanche, je rappelle que nous célébrons cette année les quarante ans de la loi de 1976 sur la protection de la nature qui, pour la première fois, a défini l'animal comme un être sensible – ce qui est maintenant inscrit dans le code rural à l'article L. 214-1, qui dispose que : « Tout animal étant un être sensible doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce. » Enfin, le traité d'Amsterdam stipule que l'Union européenne doit tenir compte du bien-être animal lorsqu'elle élabore une réglementation. Cela dit, j'estime qu'il serait opportun que la Déclaration universelle des droits de l'animal soit officiellement reconnue par l'UNESCO.

Nous sommes évidemment disposés à faire partie de comités d'éthique.

Pour ce qui est de la consommation de viande, nous avons constamment demandé aux consommateurs français de « consommer moins, mais mieux », en leur conseillant par exemple d'acheter des poulets fermiers, élevés en liberté. En 1997, ayant analysé les cahiers des charges des signes de qualité, à savoir les produits « Label Rouge » et ceux issus de l'agriculture biologique, nous avons déploré que cette dernière n'impose pas de normes supplémentaires en matière de transport et d'abattage des animaux. Si nous avions été entendus, peut-être l'agriculture bio ne serait-elle pas discréditée comme elle l'est aujourd'hui après la diffusion d'une vidéo montrant des pratiques inacceptables dans un abattoir certifié bio.

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