Je suis favorable à la prolongation de l'état d'urgence sur notre territoire. La menace islamiste, les explosions sociales, l'accélération des flux migratoires ajoutent au risque accru d'attentats contre la France. Quelques remarques sont cependant nécessaires concernant l'équilibre de cette politique.
La première concerne la difficulté légale, dans un État de droit, de lutter contre le terrorisme, un terrorisme formé par l'État islamique, ou par la télévision puisque tout se dit à la télévision. Un chef terroriste n'aura chez lui aucune arme, pas d'ordinateur, et sera donc à l'abri de toute enquête. Par ailleurs, le nombre de terroristes potentiels rend la surveillance très difficile car il faut beaucoup de monde pour surveiller ne serait-ce qu'une personne. Il ne serait pas non plus sage de mélanger lutte contre le terrorisme et lutte contre les manifestations.
Quelle est la portée de l'assignation à résidence dans la lutte contre le terrorisme ? Un terroriste assigné à résidence peut continuer d'agir. Mais il est vrai que, dans un État de droit, nous n'avons pas beaucoup d'autres moyens.
Qu'a-t-on fait dans la lutte contre l'islamisme radical, qui est le fond du problème ? À l'exception de quelques clips, critiqués par les spécialistes, et d'arrestations notables au départ, les mesures concrètes d'endiguement de la radicalisation de certains territoires se font attendre. Dans mon département, face à la perpétuation de milices de la charia en Avignon ou aux conflits entre salafistes à Bollène, le Gouvernement reste sans rien faire.
Où en est l'exemplarité ? Comment l'exécutif peut-il banaliser le terme « kouffar » dans la période actuelle ? Les symboles agissent, monsieur le ministre, et chacun sait que le mot « kouffar » est une banalisation de l'appel à la persécution des mécréants au coeur de l'idéologie takfiriste qui agite beaucoup d'islamistes.
Vous avez fait le lien avec la politique internationale. Comment croire à l'efficacité de l'état d'urgence tant que la France poursuivra une politique caricaturale sur le dossier syrien ? Faites-vous pression sur le Quai d'Orsay pour sortir d'une posture qui ne fait qu'aggraver le risque pesant sur notre pays ?
Les Français ont relativement bien subi les premiers attentats, en raison de la surprise, mais il n'est pas certain qu'ils supportent de nouveaux actes terroristes. Chacun d'entre nous doit réfléchir à cette situation extrêmement inconfortable pour tout le monde.