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Vous dites qu'il ne faut pas créer un statut de travailleur économiquement dépendant tout en disant qu'il faut traiter la situation des travailleurs qui, de fait, sont économiquement dépendants. Nous partageons tous votre crainte qu'un statut de ce type ne vienne se substituer à terme à celui de salarié, ce qui explique les hésitations sur ce point. Mais des règles sont à inventer pour ces situations de dépendance économique, qui sont par exemple celle du sous-traitant exclusif d'un grand groupe et celle de l'auteur sous contrat d'exclusivité avec une maison d'édition, qui ne vit que de ce contrat et à qui l'on impose des clauses de plus en plus contraignantes.
J'avais d'ailleurs interprété les principes dégagés par MM. Badinter et Lyon-Caen comme des principes généraux du travail, et non du seul salariat. C'est ce qui me semblait apporter une vraie valeur ajoutée : ils pouvaient s'appliquer à tout type de situations, autoentrepreneurs comme sous-traitants.
Il faut donc à la fois des règles sur les situations de dépendance économique et une action plus intensive de requalification des situations de salariat déguisé.
Le rapport de M. Pascal Terrasse définit un statut d'économie de partage de frais. Airbnb permet de partager le coût de son appartement en mettant à disposition une ou deux chambres, Blablacar permet de trouver sur son trajet des personnes qui ne rémunèrent pas un travail supplémentaire, mais partagent des frais. Au fond, il s'agit d'une économie qui se situerait hors de l'entrepreneuriat et du salariat et serait limitée à cette notion de partage de frais. Cela vous paraît-il avoir un sens ?
Le rapport de M. Pascal Terrasse suggère aussi de s'intéresser à la question du déréférencement. Lorsqu'une personne travaille par l'intermédiaire d'une plateforme collaborative et que celle-ci décide de la déréférencer, c'est une forme de licenciement économique. Avez-vous des réflexions sur ce point ?
D'autres questions se posent sur la transparence des systèmes de notation, qui induisent des formes de grilles salariales. Une personne notée avec cinq étoiles pourra revendiquer une rémunération de cent euros de l'heure, une autre notée avec une seule étoile ne touchera qu'un euro de l'heure, et le procédé pour passer d'une étoile à cinq étoiles est particulièrement opaque. Ce sont des choses que l'on connaît bien en droit du travail, mais qui ne sont pas du tout encadrées dans le domaine de l'économie des plate-formes.
Enfin, vous avez évoqué la question de la loyauté de la négociation. Vous avez évoqué, sans dire que vous en étiez à l'origine, le fait que la justice se saisisse de cette question. Avez-vous des réflexions sur la façon dont une négociation devrait être menée pour être considérée comme loyale ?