Sauf certains au MEDEF, personne ne conteste le bien-fondé du CPA. Intellectuellement, cette idée est largement partagée au sein du patronat.
En revanche, ce qui me frappe, à propos des lettres sans réponse que vous évoquiez tout à l'heure, c'est l'absence totale de concertation. Cela étant, pourquoi n'avez-vous pas répondu à la ministre que vous vouliez vous saisir de la réécriture du code du travail ? Pourquoi ne pas dire, si l'on entend donner plus de place aux accords d'entreprise, que vous voulez en discuter entre vous et avec le patronat ? Pourquoi n'avez-vous pas répondu positivement à cette demande puisqu'en l'occurrence, vous avez été saisis formellement du rapport Combrexelle ?
J'ai beau suivre le sujet depuis longtemps, je serais incapable de répondre à un salarié qui me demanderait si tout ce qui est réécrit sur le temps de travail est à droit constant. Vous avez des experts, qui ont sans doute épluché le texte. Pour ma part, des parlementaires m'ont demandé si j'étais sûr que le texte ne changeait rien à la question des astreintes. En réalité, je ne sais pas vraiment ce qu'il en est.
Ce qui m'inquiète plus, ce n'est pas tant que les choses bougent, c'est que vous, les partenaires sociaux, organisations de salariés ou d'employeurs, vous n'ayez pas eu un délai suffisant – trois mois ou six mois, par exemple – pour étudier le texte, en peser les conséquences, voir si les entreprises, sur tel ou tel sujet, en fonction de leur taille, de la présence syndicale, sont armées pour discuter de telle ou telle mesure.
Je pourrais dire la même chose sur la question du licenciement : fixer des critères valables pour toutes les entreprises de France, qui rendront les licenciements automatiques, ce n'est pas rien !
Qu'il n'y ait pas un temps pour la négociation – qu'elle aboutisse ou non – n'est pas une bonne chose pour le pays, quelles que soient les idées qu'on a sur le sujet. Pour ma part, en tant que parlementaire, j'ai l'impression de légiférer un peu à l'aveugle.
C'est pour cette raison que je suis très sensible, ainsi que le président de la mission d'information, aux questions de méthode. Pour moi, cela suppose une obligation de se réunir et, au-delà des études d'impact, des moyens en termes d'expertise juridique et de simulation. Il faut, en effet, pouvoir évaluer le coût de telle ou telle idée, par exemple, en matière d'assurance chômage.
En ce qui concerne l'articulation entre les partenaires sociaux et le Parlement, je me réjouis que vous portiez cette vision du rôle du parlementaire et du négociateur. C'est ce que j'appelle une « valse à trois temps ». Nous devons à la fois respecter les accords qui nous sont transmis et être libres de modifier ce qui ne nous paraît pas conforme à notre vision des choses.
Pour ma part, je ne voterai jamais une mesure autorisant des lettres de licenciement non motivées, même s'il arrive que des employeurs soient condamnés alors qu'il y a faute manifeste du salarié. Je pense que la plupart des parlementaires ne la voteraient pas non plus. C'est une sorte de ligne rouge que nous nous sommes fixée, pour éviter de nous retrouver dans une situation où vous signeriez un accord en contradiction avec ce que nous aurions voté.
Cela étant, je serais prêt, intellectuellement, à envisager la situation inverse. Si ce comité permanent était créé, vous pourriez auditionner un rapporteur ou les groupes politiques de l'Assemblée nationale pour leur demander leur avis, puis prendre en compte cet avis lorsque vous négociez.
Il nous faut inventer une articulation intelligente. Je porte depuis longtemps l'idée d'une institutionnalisation du dialogue social au plan interprofessionnel, avec des comités de rédaction. Car, aujourd'hui, ce sont des textes du MEDEF que nous avons jusqu'à une heure avant la signature d'un accord. Les négociations se font en back office, les syndicats sachant très bien comment elles vont se terminer car, la dernière nuit, tout change. Nous vivons dans un système médiatique, et ceux qui ont émis des critiques, même si l'accord final leur convient, ont du mal à changer de position parce que le débat s'est figé dans l'opinion publique. Ce serait très différent si nous avions un comité de rédaction et un texte qui converge vers le point d'arrivée, au lieu d'un texte du MEDEF amendé.
Cela étant dit, j'insiste sur la question des moyens. En tant que parlementaires, nous souffrons, par rapport à l'appareil d'État, d'une insuffisance de moyens. Malgré la grande qualité de nos administrateurs, les moyens de l'Assemblée sont, en termes quantitatifs, cent fois moins importants que ceux de l'État, et cela nous bride dans notre capacité d'expertise des textes qui nous sont proposés. Je pense que cette question sera fondamentale pour vous.
Pensez-vous que ce comité rapatrierait en son sein les groupes paritaires de négociation concernant les retraites complémentaires ou l'UNEDIC et tous ceux qui sont associés à des organismes de gestion paritaire ?