En matière de solidarité et de mutualisation, tout est possible. Cela impliquera certes des redéfinitions, mais voyez les réflexions en cours sur le CPA : pourquoi ne pas étendre le bénéfice d'un droit tout au long de la vie à d'autres statuts que celui du salarié classique – fonctionnaires, auto-entrepreneurs… – ? Au tout début de nos travaux sur le CPA, j'avais demandé à nos juristes d'envisager l'inclusion dans le dispositif d'un droit au logement pendant les périodes de transition professionnelle. Seulement, l'enthousiasme se heurte à la réalité. On peut en effet concevoir un droit au logement attaché au salarié tout au long de sa vie ; mais qu'adviendra-t-il de cette belle idée, sachant les difficultés que la CFE-CGE éprouve à faire admettre au patronat que l'on commence par inclure dans le CPA le compte épargne temps ? Pourtant, ce pourrait être un outil formidable en faveur de la reconversion professionnelle. Donc, l'idée est excellente, mais elle est difficile à mettre en oeuvre alors que se profile pour Action Logement l'exercice compliqué qu'est la centralisation en un groupe national unique des 22 comités interprofessionnels du logement. Surtout, on s'aperçoit que la distribution des logements par le biais des entreprises ne va pas directement aux salariés qui étaient concernés : les partenaires sociaux conservent la maîtrise de la construction et de la rénovation, mais ce n'est plus le cas de l'aide pure au logement. Le droit initial s'est en quelque sorte perdu en cours de route, notamment pour les personnels d'encadrement.
Cela étant, le paritarisme a su bâtir l'AGIRC et l'APEC, et l'on peut très bien imaginer que les générations qui nous suivront sauront, elles aussi, faire ce qu'il faut. Au demeurant, toute réflexion sur le champ d'intervention du paritarisme amène à réfléchir à la composition des conseils d'administration. Les choses sont très différentes selon qu'y siègent uniquement des partenaires sociaux, ou selon qu'ils sont élargis à des personnalités qualifiées ou qu'y figurent un commissaire du Gouvernement ou des représentants des régions ; dans tous ces cas, l'exercice est plus lourd.
Le logement joue un rôle décisif au service de l'employabilité, la CFE-CGC en est convaincue ; mais, je le redis, nous sommes favorables à l'élargissement des missions du paritarisme si, en parallèle, les financements sont étendus.
La CFE-CGC s'est embarquée dans l'aventure de la formation professionnelle avec l'envie d'améliorer l'outil, mais le financement du dispositif est compliqué. Nous sommes favorables à la transparence car nous voulons rectifier l'image du système de financement de la formation professionnelle par les partenaires sociaux. J'observe toutefois que la loi a été promulguée en mars 2014, que la suppression des anciens mécanismes a été effective le 1er janvier 2015 mais que les décrets d'application du nouveau texte n'ont été publiés qu'un an plus tard, si bien que les organisations professionnelles ont dû justifier a posteriori l'utilisation conforme des fonds qu'elles avaient reçus ; c'est un exercice difficile. D'évidence, les différents volets de tout nouveau système doivent être mis au point en même temps. À cela s'ajoute le fait que la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi a ajouté aux missions du Fonds paritaire le financement de l'Institut de recherches économiques et sociales (IRES) et celui du dialogue social territorial, sans avoir modifié l'assiette du financement ; cela a pour effet de réduire les moyens disponibles. En d'autres termes, il faut toujours vérifier que les mesures proposées sont applicables et, donc, suffisamment financées : penser le paritarisme, c'est ne pas lui allouer une enveloppe étale à vie.
Il faut aussi financer la formation des administrateurs, qui doivent être de plus en plus compétents. Dans une organisation représentative nationale telle que la nôtre, les équipes sont très restreintes, et le détachement pour exercer un mandat syndical n'existe pas dans le secteur privé. Si le paritarisme était mieux financé, les partenaires sociaux pourraient être mieux formés ; la négociation y gagnerait en qualité.