Intervention de Pascal Popelin

Séance en hémicycle du 19 mai 2016 à 15h00
Lutte contre le crime organisé le terrorisme et leur financement — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Popelin, rapporteur de la commission mixte paritaire :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, madame la vice-présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, madame la rapporteure de la commission mixte paritaire – chère Colette Capdevielle –, mes chers collègues, le texte sur lequel la commission mixte paritaire a trouvé un accord est attendu et important.

Les articles 1er à 11 et 17 à 21, dont j’ai été le rapporteur, doteront en effet nos magistrats et nos forces de l’ordre de moyens nouveaux, permettant de mieux prévenir et de mieux combattre le terrorisme. Ils ont vocation à adapter notre droit aux évolutions des menaces auxquelles nous sommes confrontés, à couvrir les angles morts de nos moyens juridiques tels qu’ils ont été identifiés au cours des dernières années. Si ce texte n’est en rien une transposition dans le droit commun des procédures spécifiques de l’état d’urgence, il crée les conditions d’une possible sortie de cette période d’exception, sans désarmer nos capacités juridiques de lutte contre le terrorisme.

Partant de ces objectifs que nous partageons tous, mais d’approches parfois différentes quant au meilleur chemin pour les atteindre, nous étions parvenus à trouver, en première lecture, une écriture qui avait permis l’adoption de ce projet de loi par une très large majorité de l’Assemblée nationale. Forts de ce vote et empreints de l’esprit de rassemblement qui l’avait rendu possible, nous avons travaillé, avec Colette Capdevielle et Dominique Raimbourg, à rapprocher nos points de vue de ceux des sénateurs, représentés par le rapporteur du texte au Sénat, Michel Mercier, et par le président de la commission des lois de la Haute assemblée, Philippe Bas. Ces échanges fructueux, faits de concessions réciproques, nous ont permis de présenter à la commission mixte paritaire des amendements communs aux rapporteurs de chacune des deux chambres. Les travaux de la CMP s’en sont naturellement trouvés facilités et ont abouti à un vote unanime des présents, après quelques ultimes discussions.

S’agissant des dispositions renforçant l’efficacité des investigations judiciaires, nous avons retenu une grande partie des améliorations apportées par le Sénat aux dispositifs votés par l’Assemblée nationale en matière de perquisitions domiciliaires nocturnes et de recours aux techniques spéciales d’enquête. Nous nous sommes accordés sur une rédaction nouvelle, qui me semble plus pertinente, sur la saisie des données informatiques et l’usage judiciaire de l’IMSI catcher.

Les dispositions renforçant la répression du terrorisme sont celles qui ont suscité le plus de discussions.

Le Sénat a accepté de revenir sur plusieurs articles qu’il avait introduits alors que l’Assemblée nationale ne les avait pas retenus, pour des raisons pragmatiques – je pense à la criminalisation de l’association de malfaiteurs en vue d’une entreprise terroriste « commise à l’occasion ou précédée d’un séjour à l’étranger sur un théâtre d’opérations de groupements terroristes » – ou pour des raisons de principe – je pense par exemple à la systématisation de la peine complémentaire d’interdiction du territoire français pour les étrangers reconnus coupables d’une infraction terroriste, qui contreviendrait à l’attachement que nous portons à l’individualisation des peines.

Nous avons, en revanche, accepté la création de deux nouveaux délits, l’un d’entrave au blocage des sites faisant l’apologie du terrorisme, et l’autre de consultation habituelle de tels sites, même si je continue d’émettre des réserves sur la constitutionnalité de ce dernier. La jurisprudence tranchera sans doute rapidement ce point.

Un compromis s’est facilement dégagé sur le renforcement du cadre répressif applicable en cas de non-dénonciation d’infractions terroristes par les proches des auteurs et sur l’aggravation des peines encourues par les personnes refusant de remettre la convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie susceptible d’être utilisé pour commettre une infraction.

S’agissant du renseignement pénitentiaire, nous sommes revenus au texte adopté par notre assemblée, qui permet l’intégration du Bureau du renseignement pénitentiaire dans le deuxième cercle de la communauté du renseignement. Nous avons également complété les dispositions votées par le Sénat en matière de contrôle des communications illégales en détention à des fins judiciaires.

Pour ce qui concerne l’inscription dans la loi des unités dédiées dites « de déradicalisation », nous avons retravaillé la version adoptée par le Sénat, considérant que les expérimentations doivent être menées à leur terme avant toute systématisation.

Nous avons conservé le durcissement, proposé par le Sénat, des modalités de relèvement de la période de sûreté de trente ans ou incompressible en matière de terrorisme, adoptée par notre assemblée, sous réserve de rendre consultatif l’avis de la commission de cinq magistrats de la Cour de cassation.

Le temps m’étant compté, je ne m’attarderai pas sur les dispositions renforçant l’enquête et les contrôles administratifs, sur lesquelles la CMP est parvenue à un accord sans difficulté.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à approuver par votre vote les résultats de ce travail et à doter ainsi notre droit des outils qui lui font aujourd’hui défaut pour mieux faire face à ceux qui, par leurs entreprises criminelles et terroristes, s’en prennent à la France, à ses habitants et à ses libertés.

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