Intervention de Jean-Michel Clément

Séance en hémicycle du 19 mai 2016 à 15h00
Statut des magistrats et conseil supérieur de la magistrature - modernisation de la justice du xxie siècle — Article 50

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Michel Clément, rapporteur :

Monsieur le ministre, vous connaissez ma détermination sur ce sujet. Sur le principe d’égalité, l’expérience récente nous a appris, à la suite notamment de dépôts de bilan intervenus dans votre région – je pense en particulier aux affaires Doux et Amice Soquet –, que dans les contentieux, ceux qui étaient restés sur le bord du chemin étaient les agriculteurs producteurs qui avaient livré et fait fonctionner pendant des années ces groupes agroalimentaires.

Ce qui m’a conduit à formuler cette proposition est précisément le fait que, comme nous l’a enseigné la pratique, les victimes étaient toujours les mêmes et que, dans la chaîne de valeur, des privilèges étaient déjà consentis aux bailleurs ou aux vendeurs de semences, notamment dans le cadre d’une chaîne de production agricole, et que le producteur en était toujours tenu à l’écart.

Il est certes possible d’introduire une garantie contractuelle, mais on sait bien que de telles garanties ne sont pas spontanément négociées dans le cadre des relations qui s’installent dans la durée entre les agriculteurs et leurs clients et que, lorsque survient un événement tel qu’un dépôt de bilan, les producteurs se trouvent systématiquement dans la cohorte des chirographaires, avec des conséquences en chaîne – je l’ai vécu dans certains domaines, où l’on savait que, dès qu’un nombre important d’entreprises agricoles étaient victimes d’un dépôt de bilan en aval, il faudrait traiter les cas de dix, vingt, trente, quarante ou cinquante producteurs identiques.

Le privilège qui serait créé pour le producteur serait limité dans le temps – à savoir pour les livraisons des trois derniers mois, ce qui doit tout de même être apprécié à sa juste mesure. Quant au risque d’inconstitutionnalité que vous évoquez au nom de la rupture du principe d’égalité, je ne le vois pas, pour les raisons que j’évoquais précédemment. Autour d’un produit agricole qui a vocation à être objet de convoitise, l’unique acteur qui ne soit pas protégé est l’agriculteur producteur.

La disposition suggérée est très largement souhaitée par la profession agricole tout entière. Dans la période de crise que connaissent aujourd’hui certains secteurs de l’activité agricole, je vous invite, mes chers collègues, à ne pas voter cet amendement.

Je rappelle en outre qu’en commission,la disposition que j’ai fait introduire a reçu un accord unanime de l’ensemble de mes collègues. C’est la raison pour laquelle je la défends avec conviction.

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