Comme vous, monsieur le secrétaire général, nous avons le sentiment que les organismes paritaires pris individuellement fonctionnent plutôt bien et s'améliorent. Certes, l'assurance chômage présente un déficit, mais on comprend bien pourquoi et, à titre personnel, je l'assume, car j'estime que l'assurance chômage doit jouer un rôle d'amortisseur social. Bref, ces organismes font preuve de sérieux dans leur gestion et montrent une capacité d'innovation – je pense notamment à la création du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.
En revanche, ce qui nous frappe, c'est la difficulté du système pris dans son ensemble à évoluer, mais aussi à prendre en compte l'éclatement des collectifs d'entreprise et des parcours professionnels. On traite chaque personne à un moment particulier de sa vie : « je suis au chômage », « je suis salarié », mais jamais avec une perspective : « je suis salarié et je suis confronté à un risque de chômage, donc je me forme pour l'éviter », « je deviens chômeur, mais j'avais engagé un projet de formation lorsque j'étais salarié et je vais l'achever ». Il est possible de monter des projets de formation, mais c'est extraordinairement complexe. Un responsable du Fonds de gestion du compte individuel de formation (FONGECIF) d'Île-de-France nous a expliqué que, pour monter des projets de formation un peu longue pour les salariés, il lui fallait six mois de travail, en prenant un morceau de congé individuel de formation (CIF) et en regardant les droits restants sur le compte personnel de formation (CPF), tout en sollicitant les OPCA. Sans être partisans d'un grand chamboule-tout – il peut en effet s'agir de faire évoluer le front office sans changer les structures –, nous ressentons fortement le besoin de dépasser chaque organisme pris individuellement et de construire une rationalité collective.
Je reviens à ma première question : selon vous, le paysage du paritarisme est-il stabilisé ou non ? En d'autres termes, estimez-vous que ce qui doit être géré par les partenaires sociaux l'est aujourd'hui, et que ce qui ne doit pas l'être ne l'est pas ? Ou bien voyez-vous des domaines auxquels le paritarisme pourrait être étendu ? Ou, au contraire, des domaines qui devraient désormais relever de l'État ?
Quelles sont vos réflexions sur la répartition des rôles entre l'État et les partenaires sociaux ? Il y a, au fond, deux modèles : celui de l'assurance retraite, avec un étage de base étatique et un étage complémentaire – l'AGIRC et l'ARRCO – qui relève presque intégralement de la responsabilité des partenaires sociaux ; celui de l'assurance chômage, qui est un modèle de « séparation verticale », avec une assurance pleine prise en charge par les partenaires sociaux, mais limitée dans le temps, et un système étatique qui prend le relais. Faut-il en rester à ces divisions ou bien généraliser l'un des deux modèles ? Quid, par exemple, d'un socle de droits, notamment au revenu, à l'assurance chômage et à la retraite, qui seraient non pas proportionnels au salaire, mais identiques pour tous – cela renvoie à l'idée d'un revenu universel – et qui relèveraient de l'État, complété par un système d'assurance collective pour ces différents risques, qui serait géré par les partenaires sociaux ?