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Intervention de Véronique Descacq

Réunion du 11 mai 2016 à 16h15
Mission d'information relative au paritarisme

Véronique Descacq, secrétaire générale adjointe de la Confédération française démocratique du travail, CFDT :

Merci de nous entendre de si nombreuses fois et si longuement. En préambule, vous avez parlé de paritarisme à propos de négociation et de gestion. À la CFDT, nous faisons bien la distinction entre, d'une part, la négociation, et, d'autre part, la gestion par des organismes paritaires et des opérateurs. Pour nous, au stade de la négociation, il ne s'agit pas à proprement parler de paritarisme ; en tant que négociateurs, les partenaires sociaux sont des créateurs de norme. En revanche, il existe un paritarisme de gestion, comme à l'Unédic pour l'assurance chômage. Ensuite, ce qui est décidé au niveau du paritarisme de gestion est mis en oeuvre par des opérateurs. C'est ainsi que Pôle emploi est l'opérateur de l'Unédic, organisme de gestion paritaire.

Dans notre travail quotidien, nous avons déjà eu à redéfinir clairement les rôles entre l'Unédic et les négociateurs, par exemple, pour l'établissement des règles. Les acteurs du champ de l'emploi et de l'assurance chômage ont dû l'évoquer lors de leurs auditions. Lors de la création des droits rechargeables, en 2014, l'Unédic a été alertée de certains dysfonctionnements : des personnes qui avaient eu des contrats faiblement rémunérés, pendant leurs études par exemple, rencontraient des difficultés dans la mise en oeuvre de leurs droits. En l'occurrence, l'Unédic a bien joué son rôle d'organisme paritaire : elle a saisi les partenaires sociaux qui se sont de nouveau réunis pour rediscuter des règles. Ce n'est pas l'Unédic, même si elle est gérée paritairement, qui a pris la liberté d'interpréter la règle.

C'est important au regard de l'une des questions que vous posez sur la représentativité : faut-il asseoir la gestion paritaire sur la représentativité syndicale et patronale ? Nous avons nous-mêmes longuement hésité sur cette question. À un moment, nous avons considéré qu'il fallait effectivement asseoir la gestion paritaire sur la représentativité.

À l'occasion de la négociation sur le paritarisme en 2012, nous avons eu l'occasion d'étudier cette question d'un peu plus près et nous avons conclu que la mesure de la représentativité était importante lors de la construction de la norme juridique, pour des raisons de légitimité démocratique – la norme est créée par une majorité – et de légitimité sociale – elle doit être en phase avec les aspirations des salariés. En revanche, une fois la norme créée et compte tenu de l'encadrement qui existe dans un système de gestion paritaire, la représentativité intégrale n'est pas vraiment nécessaire.

Nous avons donc modulé notre position pour considérer que la composition d'instances paritaires peut tenir compte, pour partie, de la représentativité, et, pour une autre partie, de l'égalité entre les organisations syndicales. Il n'est pas nécessaire d'être signataire d'un accord pour être autour de la table dans la gestion paritaire. En revanche, il ne faudrait pas que, par exemple, une organisation se retrouve en position d'empêcher la mise en oeuvre d'un accord interprofessionnel qu'elle n'aurait pas signé et néanmoins majoritaire. Il faut trouver des modalités qui permettent à chacun de bien garder son rôle : d'un côté, la création de la norme, et, de l'autre, la gestion et la mise en oeuvre de la norme.

Sur quel fondement faire le choix d'une gestion paritaire, étatique, tripartite ou quadripartite ? À l'occasion de cette négociation de 2012, nous avons rappelé ce qui, à notre avis, fonde la légitimité de la gestion paritaire : la proximité avec les bénéficiaires auxquels la norme s'adresse, en l'occurrence les salariés et les entreprises. Une part de notre légitimité dans l'assurance chômage et dans la formation professionnelle est fondée sur notre connaissance du terrain. Nous connaissons à la fois le fonctionnement de l'entreprise et les aspirations des salariés.

Le reste de la réponse en découle. Partout où les règles mises en oeuvre dépassent le champ strict de l'entreprise ou du salarié, la gestion tripartite ou quadripartite est utile, voire indispensable. On peut en trouver de nombreux exemples parlants dans la formation professionnelle. Il est tout à fait légitime que les partenaires sociaux soient extrêmement investis dans la gouvernance des instances de formation professionnelle, en particulier dans les branches au travers des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), et même au niveau interprofessionnel puisque les salariés et les entreprises sont à la fois les financeurs et les récipiendaires. En même temps, on voit bien qu'il y a un intérêt qui dépasse largement ce champ, non pas parce que cela concerne aussi les demandeurs d'emploi – que les organisations syndicales peuvent légitimement représenter –, mais parce qu'il y a un intérêt général à organiser la montée en compétence des salariés, des non-salariés et des demandeurs d'emploi.

Cette montée en compétence doit aussi être en adéquation avec les besoins de l'économie. D'autres acteurs, notamment l'État et les régions, sont alors légitimes à intervenir dans les domaines qui les concernent. D'où cette forme de gouvernance un peu originale que nous avons mise en place autour de différentes structures : le conseil national de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelle (CNEFOP), les conseils régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelle (CREFOP), le comité paritaire interprofessionnel national pour l'emploi et la formation (COPANEF), les comités paritaires interprofessionnels régionaux pour l'emploi et la formation (COPAREF).

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