Au vu des nombreuses discussions que nous avons eues, nous constatons que la négociation rencontre une difficulté dans la forme, et nous avons déposé, le rapporteur et moi, un amendement, qui a été débattu, tendant à créer une commission permanente du dialogue social. Aujourd'hui, les négociations se font sur la base de textes du MEDEF, ce qui constitue le meilleur moyen de ne pas trouver d'accord. Ne serait-il pas possible, par ailleurs, de choisir un lieu neutre – le CESE, par exemple – où l'on discuterait en présence d'un tiers de confiance qui veillerait à ce que la négociation se déroule dans de bonnes conditions ?
Le MEDEF nous a indiqué y être défavorable, mais ne pensez-vous pas que notre société a atteint un niveau de maturité permettant aux partenaires sociaux, qui sont des acteurs extrêmement puissants, de disposer d'un lieu neutre ainsi que d'un arbitre indépendant ? Les sujets sur lesquels les partenaires sociaux ont à s'entendre sont très nombreux, et les gouvernements écrivent à l'ensemble des organisations, souvent sans recevoir de réponse, pour qu'enfin les choses avancent.
Nous sommes à peu près à un an de l'élection présidentielle. Des candidats, dont certains ont occupé de très hautes fonctions, comme celle de Président de la République ou de Premier ministre, se sont exprimés sur le paritarisme. D'aucuns ont parlé de « dynamiter le paritarisme » ; d'autres respectent le modèle social français tel qu'il est, tout en ayant conscience qu'il nécessite quelques aménagements.
Nous vivons une période charnière, et l'exercice législatif en cours n'est pas très bon pour le système paritaire. Au regard des prochaines échéances électorales, je suis même inquiet. Le paritarisme est mal connu, y compris des décideurs publics, et assez illisible ; quant à son efficacité, c'est à nous qu'il revient de la démontrer, et c'est l'un des objectifs de notre mission d'information. Ce qui est certain, c'est que les tuyaux d'orgue de cette structure qui gère le modèle social français ne se parlent quasiment pas : ainsi, la médecine du travail et la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP), qui sont toutes deux paritaires, ne communiquent que rarement entre elles.
Il faut que celles et ceux qui occupent ces fonctions prennent conscience de l'existence d'un risque. Je ne veux pas sonner le tocsin, mais ils doivent prouver que ce modèle, tel qu'il existe, n'est pas le frein à l'emploi et à la réforme de l'entreprise : il est celui qui a permis à nos compatriotes de bénéficier d'un système social d'une grande qualité, certes, mais aussi d'une grande complexité.