Il n'y a pas de cahier des charges. En revanche, la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et des commerces en gros des viandes prévoit la « classification des emplois », avec une définition des postes : le salarié doit donc avoir acquis un savoir-faire spécifique pour accéder à tel ou tel échelon. L'adaptation de la grille des classifications a été réalisée en 2010, étant entendu que le salaire de base déterminé par la convention collective n'est pas le salaire réel, qui relève de l'entreprise. Lors des entretiens individuels annuels, le chef de service fait le point avec les salariés, ce qui lui permet de détecter d'éventuels problèmes et de recevoir les demandes de formation et de changement de poste ou de service.
Grâce au tutorat, les salariés sont accompagnés sur les postes les plus difficiles par des salariés en poste depuis de longues années et dont le savoir-faire est incontestable : c'est cela qui les autorise à transmettre ce savoir-faire et surtout un savoir-être : il s'agit d'un lien d'accompagnement entre le salarié et son tuteur, et non un lien hiérarchique. Sans être une obligation, cette méthode est développée par bon nombre d'entreprises pour capitaliser le savoir-faire acquis, mais aussi alléger le travail des salariés en fin de carrière, éventuellement dans le cadre d'un accord sur la pénibilité.
L'information est un élément central : c'est par l'information qu'on pourra attirer des jeunes vers la profession. D'ailleurs, lors de nos opérations « portes ouvertes », les visiteurs se montrent toujours très surpris par les équipements existants dans nos entreprises. Nous avons donc tout intérêt à les leur montrer.
Comme dans tous les milieux, des « pétages de plombs » peuvent se produire dans les abattoirs. C'est le rôle de l'encadrement d'être vigilant vis-à-vis de ce problème qui peut se produire pour des raisons extraprofessionnelles – le lundi est, on le sait, un jour sensible… Votre question sur le sujet renvoyait à la problématique des cadences ; or il faut savoir que l'abattage rituel ralentit la chaîne – comme l'a expliqué un salarié dans le livre qu'il a écrit, le rituel permet de travailler moins vite. Ensuite, et même s'il est difficile d'appréhender la situation entreprise par entreprise, les cadences sur la chaîne sont adaptées au nombre de postes – une chaîne ne passera pas, à nombre de postes identiques, d'une cadence de 20 à une cadence de 40 animaux à l'heure. À cette adaptation des cadences s'ajoutent des temps de pause. Actuellement, un travail est mené avec les représentants du personnel et les CHSCT pour définir, dans le cadre des accords de pénibilité, les postes à pénibilité forte, moyenne ou faible.
Sur la vidéosurveillance, piste qui a été évoquée, nous maintenons que les mesures existantes contribuent à régler le problème sur lequel se penche votre commission d'enquête. D'abord, la réglementation communautaire a imposé une obligation de résultat avec le « paquet hygiène », qui traite du bien-être animal. Ensuite, les contrôles sont déjà importants, grâce aux vétérinaires, préposés vétérinaires, aux besoins vétérinaires vacataires, auxquels s'ajoutent les services qualité. Vous me demanderez alors pourquoi de tels faits se sont produits dans les trois abattoirs : les enquêtes judiciaires détermineront les causes de ces dysfonctionnements – les images n'ont pas été truquées. Nous ne sommes pas opposés par principe à la vidéosurveillance, pour peu que tous les critères soient réunis, d'autant que certaines situations peuvent être délicates, notamment la nuit lors du déchargement des animaux dans les bouveries : un chauffeur peut être bousculé par une bête agressive, or les petits abattoirs ne disposent pas toujours d'un gardien. Mais notre position sur la vidéosurveillance est réservée, car une telle mesure impliquerait un investissement supplémentaire et soulèverait des problématiques de droit à l'image – certains salariés ne souhaiteraient pas être filmés –, mais aussi d'acceptabilité sociale, car les représentants du personnel pourraient arguer que cette technique permettrait de filmer les salariés en train de faire des pauses, etc. En tout état de cause, ce n'est pas la solution miracle et beaucoup de choses existent déjà.
Comment notre intérêt à agir peut-il être retenu et nous amener à nous constituer partie civile ? Une interprofession a pour vocation de conclure des accords interprofessionnels qui porteront sur la peséeclassementmarquage, l'étiquetage, etc., étant de sujets qui concernent l'ensemble de la filière. Ces accords doivent recueillir l'unanimité des sections composant les collèges : un accord interprofessionnel ne peut être étendu que si la majorité des collèges a exprimé un avis favorable, étant entendu que le vote est acquis à la majorité des deux tiers au sein de chaque collège. La valeur juridique de cet accord découle de son extension prononcée par le ministère de l'agriculture, lequel contrôle sa légalité et son euro-compatibilité – c'est cette extension qui lui donne donc force de loi, à l'image d'un accord collectif étendu. La contribution volontaire obligatoire (CVO), que nous prélevons auprès des différents maillons de la filière – productiontransformationdistribution – fait l'objet d'un accord interprofessionnel renouvelé tous les trois ans : chaque section approuve le renouvellement de l'accord interprofessionnel sur la collecte de la CVO, éventuellement en le modifiant – en fonction des budgets, avec une répartition différente entre les maillons par exemple –, mais cet accord fait l'objet d'une procédure d'extension. C'est la raison pour laquelle, bien que les opérateurs des différents maillons de la filière n'aient pas de lien direct avec l'interprofession, ils ont l'obligation de lui payer la contribution volontaire obligatoire.
Notre intérêt à agir se fonde sur le préjudice porté à l'image de la filière – tel a été le cas lors du scandale de la viande de cheval, où le juge d'instruction a immédiatement accédé à notre demande de constitution de partie civile. Je ne vois pas comment il pourrait en être autrement pour les trois affaires révélées par les vidéos diffusées par l'association L214 : le préjudice est considérable.