Je travaille un peu au fil de l'eau en fonction des urgences, et cela doit représenter en effet moins de la moitié de mon temps. Mais je suis toute seule, sans collaborateurs. D'où l'importance de travailler avec des correspondants dans chaque direction.
Le rôle du haut fonctionnaire est de définir et de mettre en oeuvre la politique en faveur de l'égalité, à partir d'un état des lieux. Nous avons la chance de disposer d'un Observatoire de l'égalité entre femmes et hommes de la culture et de la communication, rapport administratif et sexué, qui est publié tous les ans ; le prochain va sortir prochainement.
Cet observatoire concerne le ministère de la culture lui-même, c'est-à-dire les directions, les dirigeants et dirigeantes ainsi que les conseils d'administration des établissements publics où la parité est respectée. Il comprend un tableau qui fait apparaître par métier, par filière, les différences d'effectifs, de rémunérations – primes comprises – entre les femmes et les hommes. Je vous le laisserai ce tableau, qui me semble assez unique, mais qui est incomplet puisque tous les effectifs du ministère n'y sont pas ; n'y figurent que les titulaires. Il nous manque toute la partie concernant les contractuels et une grande partie des effectifs des établissements publics.
Par ailleurs, cet observatoire permet d'analyser nos politiques publiques, concernant par exemple les directeurs d'établissements du spectacle vivant, le nombre d'oeuvres achetées par le Fonds national d'art contemporain, le nombre d'expositions réalisées par les centres d'art. Une soixantaine de tableaux y figurent. Il est ainsi possible d'avoir une connaissance relativement fine, même si elle est incomplète et si elle se complète d'année en année, de ce qui se passe dans nos secteurs.
Quels sont les points sensibles que l'on peut mettre en avant ? J'en citerai deux : premièrement, tout ce qui touche à l'enseignement, puisque nous avons une part d'enseignement supérieur dans le domaine culturel, où la question des stéréotypes et des métiers se pose ; deuxièmement, l'importance des inégalités dans le spectacle vivant. Comme vous l'avez dit, madame la présidente, dans ce secteur où l'on s'attendrait à beaucoup de progrès et d'ouverture, certaines situations sont tout à fait inacceptables.
Ensuite, comme je l'ai déjà dit, l'action du haut fonctionnaire comporte deux volets.
Concernant le volet interne, évidemment en appui avec le service des ressources humaines, il y a, d'une part, tout ce qui touche aux formations, aux promotions et aux rémunérations, sur lesquelles M. Prince s'est exprimé et, d'autre part, un réseau de femmes qui se disent sensibles à cette question, et sur lesquelles je pense que l'on peut davantage investir puisque c'est le moyen de constituer des viviers.
Concernant le volet relatif aux politiques publiques, il me semble important qu'elles se fassent non seulement avec les directions, mais aussi avec les acteurs culturels. Je souligne tout de même que nous sommes très peu impliqués dans le volet territorial des politiques de l'égalité. C'est un peu dommage puisque les politiques culturelles se font toujours en partenariat avec les collectivités territoriales.
Pour conclure, quel est le bilan de ces actions ?
Il y a des aspects positifs : d'abord, une avancée incontestable dans la prise en compte de la question de l'égalité, aussi bien l'égalité professionnelle que la manière de conduire les politiques publiques ; ensuite, nous pouvons développer ces actions avec les acteurs culturels à travers un comité ministériel qui se réunit chaque année, et qui est une instance de dialogue et de conception de stratégies.
Il y a des aspects négatifs, sur lesquels je passerai rapidement. Je pense que l'on peut les résumer en un seul mot, en tout cas en ce qui me concerne : l'isolement. Les hauts fonctionnaires sont insuffisamment associés aux politiques du ministère ; les directions ne sont pas suffisamment conscientes de l'importance du sujet dans les politiques qui sont menées. C'est la raison principale, selon moi, de notre insuffisance d'autorité et de moyens. Encore une fois, je n'ai pas de personnel dédié, j'ai peu de temps, et je n'ai pas de moyens de financements. Je suis obligée, de ce fait, de renvoyer ailleurs les associations qui me sollicitent.
En conclusion, c'est un excellent système puisqu'il a le mérite d'exprimer la transversalité des politiques, qui est très importante. Mais il a besoin d'être davantage soutenu, mieux ciblé, si l'on veut que la situation progresse plus rapidement.