Je voudrais revenir sur l'urbanisme. Il y a un véritable travail à refaire. L'espace urbain s'est construit récemment de manière extrêmement aménagée. Et cet espace aménagé est très normatif : dès que l'on crée un espace sportif tel qu'un skatepark ou un citystade, on crée un usage masculin. Nous savons qu'il faut faire un travail sur les garçons, mais ce sera très long, car il ne suffit pas de leur dire de lâcher leurs privilèges pour que les choses se passent ainsi, nous sommes bien placées pour le savoir.
Il va aussi falloir changer les structures de nos espaces. Nous sommes dans une phase de construction extrêmement nourrie de ces espaces, et notre travail avec les municipalités consiste à trouver des polyvalences. Le stade de Villiers-le-Bel est aussi utilisé par la communauté pakistanaise, parce que les poteaux de volley-ball du stade de volley n'ont pas la bonne largeur. On a conseillé à la mairie de trouver des modularités.
Il faut que la façon dont on construit les espaces publics permette de leur donner une polyvalence. Cela impose de revoir la façon dont on gère les espaces, où l'on place les bancs. Lorsque de nos marches sensibles, il arrive que les gens trouvent des endroits très intéressants où il n'est pas possible de s'y asseoir. Par contre, là où les bancs sont placés, ils n'ont pas envie de rester. Il faut donc revoir les espaces publics, tout en gardant à l'esprit qu'aujourd'hui, il est extrêmement restreint. La résidentialisation est induite par un travail autour de la propriété et de la sécurité, qui créé des espaces sur-sécurisés qui se révèlent sur-insécurisants. Traverser un espace complètement fermé et entouré de grillages et de caméras est extrêmement anxiogène. Avant, il y avait des espaces complètement ouverts, dont la perméabilité était plus importante et permettait plus d'usages de l'espace public.
Nous luttons contre cette tendance, mais les municipalités nous répondent que les habitants demandent la résidentialisation. Mais cette résidentialisation joue contre les femmes, parce que ces enfermements poussent les gens à rentrer chez eux, et les femmes seront les premières à le faire. Le peu d'espace qui reste sera occupé par la forme dominante.
Nous menons donc un travail de réflexion sur la ville de demain, pour qu'elle soit plus sensible, plus accessible, plus durable dans tous les sens du terme.