Intervention de Gilles Lurton

Réunion du 17 mai 2016 à 16h15
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Lurton :

Au fil des différents projets de loi de financement de la sécurité sociale, j'ai eu l'occasion d'exprimer les points de vue du groupe Les Républicains sur une politique qui a longtemps été considérée, et à juste titre, comme l'une des plus grandes réussites de notre État, une politique enviée par de nombreux pays, une politique qui a longtemps contribué à la force démographique de notre pays par rapport à nos voisins.

Je dois vous dire, madame la ministre, combien notre groupe regrette la politique que votre gouvernement mène depuis maintenant quatre années. À chaque PLFSS, il a raboté les avantages octroyés aux familles, si bien que nous avons assisté tout au long de ce quinquennat à un véritable matraquage des familles de notre pays. Plus de 4,5 milliards d'euros ont été retirés à la politique familiale depuis 2012, sans parler bien sûr des hausses d'impôt et de taxes.

Parmi ces reculs, je citerai la baisse du quotient familial, la division par trois de la prime à la naissance laquelle n'atteint plus que 308 euros pour la deuxième naissance et les suivantes, la modulation de l'allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE), la réduction du congé parental, la réduction de moitié de l'aide à l'embauche pour les assistantes maternelles pour les familles disposant de plus 4 000 euros de revenus par mois, la baisse des allocations familiales pour les enfants de quatorze à seize ans, la modulation des allocations familiales en fonction des revenus – laquelle remet en cause le principe d'universalité sur lequel elles reposent –, enfin le report du versement de la prime de naissance, désormais perçue à la naissance de l'enfant et non plus au septième mois de grossesse.

Nous le voyons, les familles, des plus modestes aux plus aisées, ont toutes trinqué. Les conséquences se font aujourd'hui sentir, même si vous le contestez. Pour la première fois, en effet, le nombre d'enfants par femme en âge de procréer passe en dessous du seuil symbolique de deux, soit le seuil de renouvellement des générations. L'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) vient de publier le chiffre des naissances en France pour les neuf premiers mois de 2015 : il y en aurait eu 19 000 de moins, soit un recul de 2,75 % par rapport à 2014 sur la même période. Autrement dit, les naissances n'auraient jamais été aussi peu nombreuses depuis 1999.

Madame la ministre, j'aurais souhaité savoir comment vous comptez enrayer cette chute de la natalité et redonner confiance aux familles. À chaque fois que je vous ai interrogée sur les raisons qui vous ont conduite à moduler les allocations familiales en fonction des revenus, vous m'avez répondu que vous souhaitiez affecter aux familles les plus nécessiteuses les sommes correspondant aux économies effectuées. Nous avons contesté ce choix, estimant que ce n'est pas le rôle des allocations familiales. Pourriez-vous nous préciser le montant des sommes ainsi affectées aux familles les plus modestes ? Je pense pour ma part que ces économies, pour une bonne partie, n'ont servi qu'à réduire le budget de la branche famille. Cela peut être considéré comme une bonne chose, mais je préférerais avoir des indications précises.

Pour ce qui concerne la prime de naissance, vos réponses à mes questions répétées ont été les mêmes : vous avez à nouveau invoqué la redistribution aux familles les plus modestes. Pouvez-vous là encore nous préciser les montants réaffectés ?

Vous m'avez également répondu que les familles les plus vulnérables pouvaient bénéficier de la prime à la naissance dès le septième mois de grossesse lorsqu'elles en avaient besoin. Les caisses d'allocation familiales, que j'ai interrogées à ce sujet, m'ont indiqué qu'en cas de difficultés, elles versaient aux familles une aide avant la naissance prélevée sur les fonds de l'action sociale des CAF. Cela n'a donc rien à voir avec la prime de naissance proprement dite. Je m'interroge d'ailleurs sur les bénéfices financiers pour l'État du versement de cette prime trois mois après la naissance de l'enfant. S'est-il agi de faire des économies la première année ?

S'agissant des places d'accueil pour les enfants, le Gouvernement avait annoncé en juin 2013 la création de 275 000 places de garde nouvelles d'ici à 2017, dont 100 000 en crèche. Nous sommes aujourd'hui loin du compte.

J'ajoute à ce bilan que le Haut Conseil de la famille pointe une dégradation des solutions de garde pour les enfants de zéro à trois ans, dégradation très vraisemblablement liée à la baisse des dotations aux collectivités locales et aux difficultés à recruter des personnels diplômés pour s'occuper des enfants.

Madame la ministre, nous avons reçu ici même il y a peu, dans le même cadre que votre audition, votre collègue Ségolène Neuville, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre les exclusions. Il me semble important de revenir sur ces sujets car je considère que la présence d'un enfant handicapé peut, si elle n'est pas bien prise en compte, constituer un facteur déstabilisant pour l'ensemble de la famille, situation dont la ministre de la famille ne peut se désintéresser pas plus que les autres membres du Gouvernement. Il s'agit d'une politique transversale qui nous concerne tous.

À la question de notre collègue Jean-Louis Costes sur les places dans les établissements et services d'aide par le travail (ESAT) ou les instituts médico-éducatifs (IME), Mme Neuville a répondu qu'il fallait envisager de nouvelles solutions d'accueil et que le placement en établissement ne devait pas être la seule solution. Je veux bien admettre cette position mais il n'empêche que nous manquons cruellement de places dans nos circonscriptions et que des familles entières se trouvent très cruellement touchées par cette situation.

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