Les trois propositions de loi que nous examinons aujourd'hui sont issues d'un travail mené conjointement par M. Jean-Luc Warsmann et moi-même dans le cadre d'une mission d'information créée par notre commission des Lois en septembre 2014.
En tant que rapporteurs de cette mission d'information, nous avons auditionné les principaux acteurs et experts de la procédure d'inscription sur les listes électorales. Ce travail nous a permis de dresser un constat alarmant : un nombre trop élevé de nos concitoyens est aujourd'hui éloigné du processus électoral, puisque l'on peut estimer à 3 millions le nombre des non-inscrits et à 6,5 millions celui des mal-inscrits.
Le rapport d'information, que vous avez adopté à l'unanimité le 17 décembre 2014, contenait une série de propositions visant à renforcer la participation aux élections, tout en garantissant la sécurisation du processus électoral.
Les trois propositions de loi que nous avons déposées le 9 décembre 2015 visent à mettre en oeuvre l'essentiel de nos propositions d'ordre législatif : la première, ordinaire, rénove les modalités d'inscription sur les listes électorales en France ; la deuxième, organique, transpose cette réforme aux listes consulaires ; la dernière, également organique, l'applique aux listes complémentaires servant à la participation des ressortissants de l'Union européenne aux élections municipales : en application de l'article 88-3 de la Constitution, elle devra être votée dans les mêmes termes par les deux assemblées.
Compte tenu de l'ampleur de cette réforme – nous proposons en effet de réécrire l'essentiel des dispositions législatives du code électoral relatives à l'inscription sur les listes électorales – mais aussi de ses implications administratives et techniques, nous avons souhaité que la rédaction de ces trois textes fasse l'objet d'une concertation étroite avec le Gouvernement. Dans cette perspective, nous avons eu de nombreux échanges avec le ministère de l'intérieur, qui a conduit, parallèlement, une concertation interministérielle. Le volet administratif et technique de la réforme a fait l'objet d'un travail d'expertise extrêmement riche mené conjointement par les inspections générales des finances, de l'administration et de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). Un chef de projet a été nommé afin que cette réforme soit menée à bien.
Les principaux axes de la réforme sont les suivants.
Le calendrier d'inscription sur les listes électorales est assoupli, avec la suppression de la période annuelle d'inscription et de révision et la possibilité, pour tout électeur, de s'inscrire jusqu'à trente jours avant un scrutin. Nous avions en effet constaté dans notre rapport d'information l'effet déterminant du calendrier d'inscription sur les phénomènes de non-inscription et de mal-inscription. Nous vous proposons donc la mise en place d'une inscription « au fil de l'eau ». Je souligne que la réouverture des listes électorales quarante-cinq jours avant les dernières élections régionales a permis la réinscription ou la meilleure inscription de 800 000 personnes.
L'INSEE créera un répertoire électoral unique, dont les listes électorales communales seront extraites, ce qui permettra de les rendre plus fiables, en garantissant l'unicité de l'inscription.
Le maire sera responsable des demandes d'inscription et des radiations pour perte d'attaches communales.
Nous proposons également la création de commissions communales de contrôle des décisions du maire, disposant du pouvoir de saisir le juge d'instance ; elles interviendront a posteriori. Leur composition sera différente selon la taille de la commune.
La durée minimale nécessaire à la reconnaissance de la qualité de contribuable local est ramenée de cinq à deux ans. Les problèmes liés à l'inscription sont en effet souvent liés à la plus grande mobilité des électeurs.
Nous proposons enfin de mettre un terme à la double inscription pour les Français établis hors de France, qui a semé le trouble lors de différentes élections.
Enfin, cette réforme de grande ampleur n'entrera pas en vigueur avant le 31 décembre 2018. La prochaine élection présidentielle ne sera donc pas concernée.
Compte tenu des enjeux de cette réforme, nous avons proposé au président de l'Assemblée nationale de saisir pour avis le Conseil d'État.