Intervention de Philippe Nauche

Réunion du 17 mai 2016 à 18h15
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Nauche :

Les faits évoqués par le rapporteur rappellent une période tragique de notre histoire, et la perception que nous en avons aujourd'hui n'est probablement pas la même que celle qui prévalait à l'époque. C'est pour cela, qu'en novembre 1998, quatre-vingts ans après la fin du premier conflit mondial, Lionel Jospin, alors Premier ministre, rendait hommage aux mutins de Craonne sur le Chemin des Dames de 1917, qui, « épuisés par des attaques condamnées à l'avance, glissant dans une boue trempée de sang, plongés dans un désespoir sans fond, refusèrent d'être sacrifiés ». Il avait souhaité que « ces soldats, fusillés pour l'exemple au nom d'une discipline dont la rigueur n'avait d'égale que la dureté des combats réintègrent aujourd'hui pleinement notre mémoire collective nationale ».

Sous la présente législature, Kader Arif, alors ministre délégué chargé des Anciens combattants, avait décidé de faire un premier pas symbolique en décernant, à l'occasion de la commémoration du 11 novembre 2012, la mention « mort pour la France » au lieutenant Jean Chapelant, que notre collègue Candelier vient d'évoquer.

Afin de poursuivre ce travail, un rapport a été commandé à l'historien Antoine Prost, et fut remis le 1er octobre 2013. La principale conclusion, qui est partagée par mon groupe politique, était que, dans le cadre du centenaire de la Première Guerre mondiale, il était important de réintégrer les fusillés pour l'exemple dans la mémoire collective.

Depuis, le président de la République, François Hollande, a décidé d'accorder à l'histoire des fusillés une place au sein du Musée de l'armée, installé aux Invalides. De même, tous les dossiers des conseils de guerre ont été numérisés et sont enfin accessibles à la recherche et au public dans un espace particulièrement consacré du site « Mémoire des hommes ».

Nous considérons qu'il ne s'agit plus aujourd'hui de juger ou de rejuger, mais de se souvenir et de comprendre, ainsi que le préconisait Antoine Prost, car il n'y a pas de reconnaissance plus forte que celle de la connaissance.

Toutefois, même s'il faut noter que la présente proposition de loi se distingue d'autres textes précédemment déposés, toute réhabilitation de portée générale, sans véritable discernement, qu'elle soit juridique ou symbolique, dilue la reconnaissance de ces victimes. La notion de « fusillés pour l'exemple » n'est de plus pas clairement définie aujourd'hui.

Par ailleurs, un certain nombre de communes qui l'ont souhaité ont pu inscrire sur leurs monuments aux morts les noms de leurs fusillés pour l'exemple. Les dossiers doivent être traités individuellement de façon que la réhabilitation, le cas échéant, conserve toute sa force. Pour ces raisons, bien que partageant les préoccupations qui la motivent, considérant que les modalités de la reconnaissance collective de cette réalité historique – qu'il nous revient d'affronter comme les autres – ne sont pas probantes, le groupe Socialiste, républicain et citoyen (SRC) n'est pas favorable à cette proposition de loi.

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