L'Institut de la filière porcine est un centre technique, qui appartient au réseau ACTA (Association de coordination technique agricole), qui réunit d'une quinzaine de centres techniques agricoles en France liés aux activités de production – animales, mais aussi végétales. L'IFIP est devenu, depuis 2006, un institut agricole et agro-industriel, avec le rachat d'une partie des activités du centre technique de la salaison, de la charcuterie et des conserves de viande (CTSCCV). L'IFIP regroupe tous les métiers, de la génétique à la fabrication du saucisson, et environ 85 experts. Nous développons des expertises très pointues sur l'ensemble des sujets qui concernent le porc, et nous nous intéressons depuis longtemps à la période qui va de la sortie de l'élevage jusqu'à la fin de la vie de l'animal.
Je suis moi-même plutôt spécialiste de la protection animale à l'abattoir, aussi bien du point de vue du comportement de l'animal que du matériel utilisé, de la gestion humaine, de la formation, de la rédaction du guide de bonnes pratiques en matière d'abattage des porcs.
La France compte, vous le savez, quelque 250 abattoirs, dont 29 spécialisés dans l'abattage de porcs. Ces derniers sont plutôt des abattoirs industriels : ce sont des outils calibrés, équipés, structurés, avec du personnel qualifié. Globalement, cela fonctionne bien. À côté de ces unités spécialisées, il existe des abattoirs multi-espèces, dont il est logique que le niveau d'équipement et de compétence soit moins élevé en matière porcine. C'est un détail qui a son importance.
La protection animale n'est pas pour nous un sujet nouveau ; nous n'avons pas commencé à nous en préoccuper avec les films de l'association L214, même si ceux-ci ont pu avoir le mérite de réveiller les consciences.
J'ai commencé mes missions en 2001 ; depuis, l'évolution est extrêmement importante. Les générations se renouvellent, et le rapport avec l'animal change. Les équipements sont devenus plus précis ; les procédures se modifient, les méthodes de protection animale aussi. L'intérêt des industriels ne date pas d'hier, il faut en avoir conscience : des choses existent déjà, même si on peut certainement en mettre en place de nouvelles. Après, il faut que ça tourne, nous en sommes d'accord.
Ce qui fait tourner un abattoir, c'est la main-d'oeuvre. Le facteur humain est tout à fait essentiel : les hommes doivent être formés, et avoir, comme l'a dit Pierre Le Neindre, conscience de travailler avec des animaux vivants, et non avec des parpaings ou des palettes de boîtes de conserve. Ce n'est pas le plus facile à faire comprendre. La majorité des opérateurs sont sérieux et compétents ; mais, comme dans toute population, on trouve parmi les personnels des abattoirs des gens que nous qualifierons de moins concernés…
La formation est réglementée depuis 2013. Elle existait auparavant, sous différentes formes, mais elle s'est renforcée : il ne s'agit pas d'apprendre aux gens à travailler, car ils savent travailler, mais de les amener à comprendre pourquoi on fait tel ou tel geste. On n'apprend pas à un opérateur qui saigne 600 porcs à l'heure comment on saigne un animal ! Mais on peut lui enseigner que s'il vise correctement les deux artères carotides, l'animal mourra plus vite.