Intervention de Luc Mirabito

Réunion du 12 mai 2016 à 10h00
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Luc Mirabito, Institut de l'élevage :

J'apporterai d'abord un petit complément à la présentation que vous avez faite, monsieur le président, de l'Institut de l'élevage : nous travaillons non seulement sur la compétitivité, mais aussi sur l'adaptation au marché, aux attentes des consommateurs.

Nous avons commencé à agir en matière de bien-être et de protection des animaux à la fin des années 1980 ou au début des années 1990. Nous nous sommes d'abord concentrés sur les questions d'élevage, en raison des nouvelles réglementations européennes. Mais nous avons assez vite travaillé sur la protection des animaux à l'abattoir, principalement sur la conception des équipements – une synthèse avait été réalisée sur ce point au milieu des années 1990 – et sur la formation, mais aussi les aspects de sécurité. Nous pensons en même temps la sécurité des opérateurs et la protection des animaux : on travaille en effet avec un binôme homme-animal. Notre approche est couplée.

Dans les années 2000, l'approche du bien-être animal a changé : d'une approche essentiellement centrée sur les moyens mis à disposition des animaux, on a basculé vers une approche qui tente d'évaluer le bien-être des animaux en réalisant des mesures sur l'animal lui-même. À partir de la fin des années 2000, date de l'entrée en vigueur du règlement européen, nos travaux ont particulièrement porté sur cette question de l'évaluation du bien-être animal sur l'animal lui-même.

Nous avons développé des guides de bonnes pratiques de la protection animale à l'abattoir, qui formalisent tout à la fois la conception des bâtiments, la méthode de travail des opérateurs et les indicateurs objectifs de la performance des opérateurs et du système. Je fais mienne ici une formule de Temple Grandin : « On gère ce que l'on mesure ». Il fallait donc proposer une formalisation : si l'on sait mesurer, alors le plus souvent on peut adopter une démarche de progrès – ce qui constitue l'objectif de nos instituts techniques.

Aujourd'hui, nous continuons à travailler sur l'amélioration des équipements et des systèmes, en gardant toujours à l'esprit le binôme homme-animal, en envisageant ensemble protection animale et sécurité humaine. Nos recherches portent également sur la question de l'évaluation, autrement dit les méthodes statistiques de traitement ou méthodes d'échantillonnage, mais aussi des sujets plus prometteurs à long terme, tels que l'objectivation des indicateurs d'évaluation. Nous travaillons par exemple sur l'objectivation de l'évaluation de la perte de conscience ; nous essayons avec l'IFIP de construire des systèmes d'évaluation assistée. Nous avons des collègues en Allemagne qui creusent ces mêmes sujets. Ces pistes nous paraissent prometteuses pour essayer de sortir de certaines querelles de chapelle et réfléchir à partir d'éléments plus objectifs.

Nous travaillons sur l'abattage classique comme sur l'abattage sans étourdissement. Chacun peut avoir là-dessus son opinion personnelle, naturellement, mais les scientifiques n'ont pas à décider s'il faut ou pas un étourdissement : notre rôle, c'est d'essayer de mettre au point les systèmes qui soient les meilleurs possible pour les animaux – en tenant compte, je l'ai dit, du risque pour les humains.

Enfin, la question de la formation est souvent revenue au cours de vos premières auditions. L'IDELE est organisme formateur ; je suis moi-même animateur du réseau mixte technologique (RMT) « bien-être animal » qui a élaboré la base de données de questions qui permet l'évaluation des opérateurs. La formation ne doit surtout pas être prise à la légère ; il y a un corpus de connaissances, y compris didactiques et pédagogiques. Changer les attitudes, les représentations, les comportements est toujours difficile, d'autant que nous avons affaire ici à une activité très particulière, avec un binôme animal-homme. Nous réfléchissons donc aussi à cet aspect.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion