Je ne reprendrai pas les arguments exposés par Christophe Sirugue au sujet de la fragilité constitutionnelle de l'article 1er de cette proposition de loi, qui me paraissent tout à fait pertinents.
Pour ce qui est de la proposition numéro 26 du candidat François Hollande en 2012, elle consistait à imposer aux dirigeants des entreprises publiques, et non privées, un écart maximal de rémunération de un à vingt, et c'est bien ce qui a été mis en oeuvre par le Gouvernement. En revanche, le programme du parti socialiste pour l'élection présidentielle proposait d'appliquer la même mesure aux grandes entreprises privées, en renvoyant à l'assemblée générale des actionnaires la possibilité d'agir sur la rémunération de leurs dirigeants. Cela implique que le principe du say on pay, appliqué dans de nombreux pays mais essentiellement consultatif, devienne obligatoire en France – c'est le sens de l'un des amendements du rapporteur –, car, en l'état actuel des choses, la charte élaborée par l'AFEP et le MEDEF peut facilement être contournée.
Par ailleurs, il me semble que nos collègues du groupe Les Républicains ont la mémoire courte. En 2008, Nicolas Sarkozy, Président de la République, s'était ému de la dérive des rémunérations des grands patrons, et si l'excellent rapport rédigé par Philippe Houillon et Jean-Luc Warsmann en 2009 a proposé différentes solutions visant à améliorer la situation, aucune n'a été mise en application. Il était ainsi suggéré de limiter la déductibilité de l'assiette de l'impôt sur les sociétés à un million d'euros ; de modifier le statut des comités de rémunération ; de limiter à trois le nombre de mandats sociaux – une mesure qui, pas plus que les deux précédentes, n'a été retenue en 2009, et que le rapporteur reprend dans l'un de ses amendements. Comme vous le voyez, le texte qui nous est soumis rejoint des préoccupations exprimées depuis des années par les parlementaires, toutes sensibilités politiques confondues.