Alors que l'écart de rémunération entre les Français moyens et les plus démunis est de l'ordre de un à sept ou huit, les sommes versées à certains grands patrons semblent ne connaître aucune limite. Même si elle ne concerne directement qu'une infime partie de la population – cette minorité de patrons percevant des rémunérations d'un montant indécent –, la question dont nous débattons aujourd'hui intéresse une majorité de Français de droite comme de gauche, qui attendent une proposition du Parlement. Afin de préserver le vivre ensemble et la moralité dans une société où les inégalités sont déjà présentes dans nombre de domaines tels que l'accès aux soins ou au logement, il devient nécessaire de s'attaquer au problème, que ce soit au moyen du projet de loi « Sapin 2 » ou de l'article 1er de cette proposition de loi, une fois « verrouillé » pour ne plus poser de problème d'ordre constitutionnel.
Ne rien faire aurait pour conséquence de créer une distorsion de concurrence entre le service public et les entreprises privées, qui se traduirait par la fuite de certains dirigeants du public vers le privé.
Je conclurai en disant que, si le fait qu'un patron gagne vingt fois le SMIC peut se justifier par sa bonne gestion, permettant à l'entreprise qu'il dirige d'afficher d'excellents résultats, et par les énormes responsabilités qu'il doit assumer, notamment vis-à-vis de ses salariés, qui peuvent être plusieurs milliers, la présente proposition aurait à mon sens tout à fait vocation à s'appliquer également à certains avocats, architectes, experts-comptables, chirurgiens esthétiques et radiologues, qui gagnent bien plus de vingt fois le SMIC dans le secteur privé – par le biais des dépassements d'honoraires en ce qui concerne le secteur médical. Il me paraîtrait choquant de légiférer sur les dirigeants du secteur privé sans que les professions libérales, ayant à assumer des responsabilités moins importantes, soient également concernées en cas d'excès.