Intervention de Danielle Auroi

Réunion du 17 mai 2016 à 18h00
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Auroi, Présidente de la Commission M. Jean Bizet, Président de la commission des Affaires européennes du Sénat :

Depuis plus de six mois, nous avons tous à l'esprit le sujet des relations entre le Royaume-Uni et l'Union européenne. J'ai conduit une délégation les 27 et 28 janvier derniers à Londres ; nous avons rencontré le ministre britannique des affaires européennes, le conseiller du Premier ministre en charge de l'Europe, des parlementaires, des représentants de la City ou de la société civile. La plupart – hasard du calendrier – étaient pour le « in ». On avait l'impression que le « in » et le « out » étaient suffisamment différenciés, mais ils sont actuellement au coude à coude dans l'opinion. Prédire un résultat serait très difficile, d'autant que les Anglais ont une faible pratique du référendum. La question posée – rester ou non membre de l'Union européenne – est adroite. La tentation du saut dans le vide est toujours à craindre… cependant le « in » l'emportera probablement.

Après le 23 juin, le dossier du Brexit ne sera pas refermé : si les Britanniques restent dans l'Union, le sujet européen sera réglé au sein du parti conservateur. Mais le rôle du Royaume-Uni dans l'Union n'en sera pas pour autant précisé. À moins d'un vote massif pour le in, il n'y aura pas de nouvel élan à la relation euro-britannique.

L'accord au Conseil européen des 18 et 19 février derniers donne des gages au Royaume-Uni en cas de maintien dans l'Union – prétendument des gages de pure forme – pour permettre à David Cameron de remporter le référendum. Mais ces dispositions sur l'articulation entre les États membres de la zone euro et hors zone euro pourraient remettre en cause « l'union sans cesse plus étroite » prévue dans les traités. Les Britanniques surveilleront ce qui se passe dans la zone euro, mais changeront-ils leurs méthodes ? Peut-être suis-je trop pessimiste…

Est prévue une modification du règlement de 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale afin que l'État membre où le travailleur réside puisse indexer les allocations familiales exportées sur le niveau de vie de l'État-membre où l'enfant réside. Malgré leur discours sur les réfugiés, les Britanniques craignent, davantage que le plombier, le peintre en bâtiment polonais. Cette question a dramatisé celle des travailleurs détachés et explique le « carton jaune » des pays de provenance des travailleurs détachés. Nous en débattrons demain à l'Assemblée : il est difficile de trouver un bon équilibre, et le Royaume-Uni ne nous y aide pas.

La proposition de modification du règlement de 2011 relatif à libre circulation des travailleurs prévoit un mécanisme d'alerte et de sauvegarde pour faire face à un afflux de migrants d'une ampleur exceptionnelle, et durant une période prolongée, de travailleurs provenant d'autres États membres. Ce constant mélange des genres me paraît dangereux…

Quel est l'avis du Parlement européen sur l'accord de février ? En cas de vote « in », dispose-t-on déjà d'un calendrier des discussions ? La solution du Conseil européen ne donne pas aux parlements nationaux le véritable droit de veto imaginé par les Britanniques. L'appellation de « carton rouge » est trompeuse : de la pure communication… Les avis motivés sur le non-respect du principe de subsidiarité par un projet d'acte législatif, adressés dans un délai de douze semaines à compter de sa transmission, représentant plus de 55 % des voix attribuées aux parlements nationaux, permettraient au Conseil de mettre fin à l'examen du projet d'acte en question. Mais si l'acte est modifié pour tenir compte des préoccupations exprimées par les parlementaires, que se passe-t-il ? Repensons certaines choses. Le seuil de ce nouveau carton serait relevé, mais serait-il plus contraignant que le carton jaune ? Il impose au Conseil de tenir compte des préoccupations exprimées.

Ce nouvel outil renforce-t-il vraiment le rôle des parlements nationaux ?

Les réponses à la sortie du Royaume-Uni de Union européenne restent très incertaines, même si l'on sait que celle-ci ne se ferait pas du jour au lendemain, mais au cours d'une période de deux ans. Si les Britanniques sautent dans le vide, les Ecossais ont fait savoir qu'ils souhaitaient rester dans l'Union et les Irlandais du Nord se demandent s'ils ne devraient pas s'unir à l'Eire.

La sortie du Royaume-Uni serait le signal du détricotage de l'Union européenne. D'autres États pourraient s'écrier : « Retenez-moi ou je fais un malheur ! » et, à l'image du Royaume-Uni, pousser si loin la négociation qu'ils finiraient par quitter Union européenne. L'Europe est bien à deux vitesses.

La logique de la coopération renforcée ne peut-elle pas se fonder sur ce qui est déjà construit, en particulier la zone euro ? Celle-ci a un sens global au-delà des accords financiers, en ce qu'elle constitue un espace ambitieux. Ne faut-il pas décider que, quelle que soit l'issue du vote britannique, la zone euro soit renforcée, peut-être par la création d'un Parlement spécifique ?

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