Nous examinons aujourd'hui une proposition de résolution européenne. J'apprécie le geste. Il est important pour les instances de décision européennes de connaître le point de vue des États membres. J'apprécie cependant moins le contenu de la proposition de la résolution.
Elle demande le respect du principe de territorialité des droits pour limiter au maximum le principe de la portabilité des contenus. Elle nuance aussi la volonté de permettre le prêt de livres numériques par des bibliothèques en rappelant la prise en compte nécessaire de la garantie de la viabilité économique de l'édition. Je ne connais pourtant pas d'étude qui ait démontré que les bibliothèques nuisent à la viabilité économique de l'édition. Au contraire, en facilitant l'accès à la lecture, le travail de médiation des bibliothèques est une garantie que les éditeurs auront toujours une activité à l'avenir.
Le projet de résolution demande par ailleurs que la position française en matière de liberté de panorama soit respectée. Il est pour le moins étrange d'adopter dans cette proposition de résolution une disposition qui fait encore l'objet d'un débat parlementaire. La loi pour une République numérique n'a pas encore été adoptée, mais doit passer en commission mixte paritaire en juin 2016.
Point positif, vous proposez que soit améliorée la libre diffusion des résultats de la recherche publique via un libre accès en voie verte. Enfin, vous demandez le respect du système actuel de copie privée. Il s'agit donc d'une proposition de résolution européenne qui défend le statu quo à la française concernant le droit d'auteur, sans jamais prendre en compte les profondes évolutions que les pratiques numériques ont apportées.
Le marché unique numérique voulu par la Commission européenne est pourtant bien moins ambitieux que le rapport de l'eurodéputée Julia Reda, qui avait lui-même était considérablement amendé par les parlementaires européens. Malgré cela, nos collègues Marietta Karamanli et Hervé Gaymard cherchent à amoindrir encore un peu plus ces évolutions.
Pourtant le droit d'auteur, tel qu'il existe aujourd'hui, ne rémunère pas de façon équitable les auteurs. Il tend, au contraire, à renforcer les inégalités de distribution des richesses de ce système, tout en bloquant certains usages, et donc une meilleure diffusion des produits culturels. Similairement, la proposition de résolution demande de ne pas toucher au système actuel de copie privée qui accuse pourtant de nombreuses faiblesses, comme le reconnaît le rapport d'information sur le bilan et les perspectives de trente ans de copie privée, rendu en 2015 par notre collègue Marcel Rogemont.
C'est pourquoi je vous propose deux amendements qui retirent de la proposition de résolution ses dispositions relatives à la copie privée et à la liberté de panorama. À défaut d'une prise en compte de ces amendements, je ne pourrai que voter contre cette résolution.