Le comportement abusif peut relever de la fraude. La fraude est toujours illicite, mais elle résulte soit de l'utilisation de moyens illicites, soit de l'usage de moyens licites. C'est le cas de l'abus de droit, qui existe depuis fort longtemps en matière fiscale, et a été codifié depuis peu en matière sociale, le code de la sécurité sociale permettant aux unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) d'écarter des actes constitutifs d'un abus de droit. Un arrêt de travail de 1 000 jours pour un lumbago – situation qui n'a rien d'un cas d'école – peut-il être qualifié d'abusif ou doit-il être assimilé à de la fraude ?
Selon le doyen Cornu, « l'abus est l'usage excessif d'une prérogative ». L'excès est parfaitement défini par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) dans une circulaire de 2012 qui indique que « sont qualifiées d'activités abusives celles qui rassemblent de manière réitérée des faits caractéristiques d'une utilisation d'un bien, d'un service ou d'une prérogative outrepassant des niveaux acceptables par rapport à des références ou des comparatifs non juridiques ». Parmi les circonstances retenues, la CNAMTS cite les « prescriptions d'arrêts de travail ouvrant droit à indemnités journalières au-delà du besoin de repos du patient ».
Quant aux référentiels, qui ont été émis par la CNAMTS après avis de la Haute Autorité de santé, ils sont prévus à l'article L. 161-39 de code de la sécurité sociale qui énonce : « L'Union nationale des caisses d'assurance maladie et les caisses nationales chargées de la gestion d'un régime obligatoire d'assurance maladie peuvent consulter la Haute Autorité de santé sur tout projet de référentiel de pratique médicale élaboré dans le cadre de leur mission de gestion des risques, ainsi que sur tout projet de référentiel visant à encadrer la prise en charge par l'assurance maladie d'un type particulier de soins ». Ainsi, un comportement abusif pourrait être qualifié par le biais de ces référentiels, validés par la Haute Autorité de santé. Sachant que l'abus signifie le dépassement de certaines normes et que les référentiels indiquent des durées maximales, la situation est selon moi potentiellement abusive lorsque la durée du référentiel est atteinte deux ou trois fois.