Il y a des pays étrangers qui ont résisté à la grande distribution, et où l'on continue à résister. Cela étant, il y a depuis quarante ou cinquante ans une spécificité française : le poids très important des six majors de la grande distribution, qui perturbent le jeu en faisant du chantage à l'emploi, alors qu'ils provoquent parallèlement une destruction d'emplois. Cela ne sert à rien de se cacher derrière son petit doigt, c'est là qu'est le problème central.
Les centres commerciaux à ciel ouvert dans les centres-villes existent déjà. Il suffit de mettre une « locomotive » au début d'une rue, une à l'autre bout, et une troisième au milieu.
Il est très difficile de répondre globalement à la question sur les rues piétonnes car, si elles ont des effets pervers, elles ont aussi des avantages. À mon avis, dans certaines villes, le logement est le problème principal. Il s'agit, en l'occurrence, d'un enjeu national, car nombre de villes risquent de se transformer en mouroirs, en ghettos, ou d'être ruinées, abandonnées. Nous le voyons physiquement dans certaines des villes que nous visitons.
Si les gens quittent les centres-villes, c'est qu'ils ne trouvent pas de logements assez grands, ou bien qu'ils veulent un jardin ou une terrasse. Les architectes savent faire cela, ce qui suppose d'accepter qu'on détruise telle ou telle maison, qu'on agrandisse une cour, que cette cour devienne un jardin, ou encore une place, sur laquelle il y aura un certain type de services et de commerces.
Avec de très bons architectes, on y arrive. Toutefois, il faut être conscient qu'il s'agit, en quelque sorte, d'acupuncture. On va ranimer progressivement tel et tel îlot et, petit à petit, l'image ne sera plus aussi négative que celle de centres à l'abandon.
En ce qui concerne les problèmes d'ordre réglementaire, l'efficacité de la CNAC et des CDAC est dérisoire. On gagne du temps ou on prend des positions par rapport aux concurrents, rien de plus. C'en est presque choquant. Le problème s'est même accentué avec la nomination de représentants du ministère de l'économie, qui acceptent quasiment tous les projets. Mon slogan, c'est plutôt : « Pas de transports en commun, et pas de permis de construire pour les centres commerciaux qui s'ouvrent en périphérie ».
La question des rez-de-chaussée, des baux et des boutiques éphémères peut être une piste, la limite de l'exercice étant la concurrence par rapport aux baux des commerçants « réguliers ». Je ne suis pas un spécialiste de la fiscalité, mais les marchés et les baux éphémères sont sans doute un moyen d'empêcher la situation de se dégrader.