Intervention de Jean-Vincent Placé

Séance en hémicycle du 24 mai 2016 à 15h00
Statut des magistrats et conseil supérieur de la magistrature - modernisation de la justice du xxie siècle

Jean-Vincent Placé :

La transformation numérique de l’État est aussi un outil pour améliorer l’efficacité des politiques publiques. La méthodologie, c’est bien, mais si elle est inefficace, elle n’a pas beaucoup d’intérêt ! Le développement de l’évaluation, permis par la technologie numérique, rend la décision publique plus pertinente et l’action de l’État plus performante. Il permet aussi de consacrer moins de ressources humaines à des tâches automatisables pour proposer un accompagnement plus qualitatif aux usagers qui en ont besoin, notamment aux publics en difficulté.

Ainsi, le dispositif d’accompagnement « 100 % web » de Pôle emploi permet à des demandeurs d’emploi volontaires de bénéficier d’un suivi intégralement dématérialisé, les contacts avec le conseiller passant par une interaction via une webcam et des tchats. Par ailleurs, des dizaines de milliers d’offres d’emploi sont déposées en ligne, sur le site pole-emploi.fr, par des partenaires de l’emploi, privés comme publics : ainsi, les demandeurs d’emploi bénéficient d’une vision la plus large possible des offres en ligne. C’est particulièrement révolutionnaire !

Le développement de l’offre de services numériques est essentiel. En effet, 40 % de la population active est née après le développement d’internet, et elle ne conçoit pas la relation avec un service public sans passer par une interface numérique.

L’enjeu est aussi économique. J’ai déjà évoqué la mise en place de la procédure du marché public simplifié, qui permet à l’acheteur public de libérer du temps pour étudier le fond des dossiers, qualifier la meilleure offre après une étude approfondie ou développer des aspects commerciaux.

Enfin, la transformation numérique de l’État est un atout démocratique. Le Président de la République a souvent insisté sur la valeur ajoutée du numérique pour « améliorer le débat public, notamment en ouvrant les données publiques », axe fort de la politique du Gouvernement depuis 2012. Sur ce sujet, nous avons la chance d’organiser, en décembre prochain, un sommet mondial qui en sera une parfaite illustration : les pays membres du Partenariat pour un gouvernement ouvert ont choisi la France pour organiser une « COP21 » de la décision publique, une fête de la démocratie qui doit aider à la réinventer de manière collaborative.

Mais nous n’attendons pas décembre pour agir. La mise en oeuvre du plan national « Pour une action publique transparente et collaborative » avance, avec les progrès de l’open data territorial et l’annonce, il y a quelques jours, au sommet de Londres, de la création d’un registre public numérique des bénéficiaires effectifs des trusts. Le recours aux consultations citoyennes se développe dans l’administration, mais de manière encore trop peu lisible et systématique ; nous avons donc vocation à améliorer et simplifier la procédure.

Depuis 2012, l’action du Gouvernement tourne autour de ces trois enjeux, en visant à les rendre concrètement atteignables. J’adresse à mes amis Gérard Charasse et Dominique Orliac un petit message à destination de Jacques Krabal, qui est certainement retenu également par une autre réunion : j’ai bien noté un certain scepticisme dans ses propos, et je souhaite le rassurer en lui apportant quelques précisions quant à la mise en oeuvre concrète des propositions portées par le Gouvernement.

Ainsi, nous avons besoin d’infrastructures capables de porter toutes ces dimensions. Le quinquennat aura été celui du dépassement des logiques purement ministérielles, désormais incompatibles, qui peuvent même constituer un frein à la transition numérique de l’administration. Je pense notamment au grand chantier du réseau interministériel de l’État, qui reliera sur un réseau informatique unique, dès l’an prochain, 17 000 points de service public sur l’ensemble du territoire. Je remercie encore la DINSIC, qui accomplit un travail de titan en recensant ces 17 000 points d’entrée vers les systèmes d’information numériques qui s’étaient créés dans l’administration.

Nous avons également besoin de professionnels du numérique. L’État en compte 18 000. Nous avons créé, au sein des services de l’État, des filières « métiers numériques », afin de permettre le développement de parcours professionnels, l’acquisition de compétences, et d’accroître l’attractivité de ces métiers. Constitution de corps interministériels, mise en place d’un référentiel interministériel des métiers et des compétences, formation en interne des profils clés, recrutement des profils rares… nous avançons sur tous ces chantiers.

La numérisation numérique de l’État suppose des échanges avec l’ensemble des acteurs du territoire. La transformation numérique des administrations dans les territoires est discutée dans le cadre de l’Instance nationale partenariale – INP –, qui a mis au point un programme de déploiement concerté. En mars, j’ai lancé une série d’appels à projets pour l’innovation numérique dans les administrations déconcentrées, qui doivent travailler avec tous les acteurs locaux, notamment avec les collectivités locales. Vous insistez sur ce point qui me semble particulièrement important.

J’en viens aux investissements. Les dépenses numériques de l’État représentent chaque année environ 4 milliards d’euros, dont 50 % en personnel. Sur 2 milliards d’euros de dépenses « hors personnel » annuelles, 1,2 milliard sont consacrés aux matériels, infrastructures et software, tandis que 800 millions sont consacrés à des projets. Grâce aux 86 millions d’euros du programme d’investissements d’avenir consacrés à la transition numérique de l’État et au financement de projets numériques innovants, ce budget a augmenté de 10 %. Ce n’est pas si fréquent, comme l’a justement fait remarquer M. Serville !

Je souhaite d’ailleurs préciser à Michel Piron que nous venons de lancer deux appels d’offres, dans le cadre du programme d’investissements d’avenir, pour soutenir les initiatives des administrations territoriales visant à créer, sur tel ou tel projet économique, social ou environnemental, des communautés numériques entre les administrations et les acteurs du secteur concerné. Ces appels d’offres bénéficient d’une dotation de 25 millions d’euros.

Parlons justement de l’innovation et de l’un des projets qui me tiennent le plus à coeur : le développement de l’open data, dont les progrès en France sont salués dans le monde entier. Ce n’est peut-être pas très modeste de le dire : sur la question de l’open data, nous sommes classés premiers par l’ONU !

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