Je rejoins le commentaire de notre collègue Charles de Courson sur les conditions requises par l'article 13 de la LOLF pour modifier les crédits par le biais d'un décret d'avance : la condition d'urgence portant sur l'ouverture de crédits supplémentaires n'est pas satisfaite, sauf pour la problématique des migrants et la crise sanitaire agricole. Les autres dépenses supplémentaires auraient dû être prévues dans la loi de finances pour 2016. En ce qui concerne les annulations de crédits, je remercie la rapporteure générale de son travail, qui complète l'audition du secrétaire d'État au budget la semaine dernière : compte tenu de la situation du pays et de l'ampleur de ce décret d'avance, il était nécessaire que nous ayons ce débat en commission des finances.
Je regrette l'annulation de 30 millions d'euros de crédits au sein de la mission Travail et emploi, car ces sommes étaient destinées au programme 102 Accès et retour à l'emploi et, plus particulièrement, aux subventions attendues par Pôle emploi. Il s'agit certes d'une enveloppe limitée, mais la méthode ne convient pas. Ainsi, ces sommes seraient basculées vers le financement de mesures de formation en faveur de l'emploi, auxquelles les régions doivent participer et qui ont été annoncées le 18 janvier dernier par le Président de la République. Or, une convention pour charges de service public avait été conclue avec Pôle emploi, qui est ici privé des subventions prévues. Cette pratique me paraît un peu étonnante.
Concernant les crédits destinés à la recherche, je me rappelle avoir rencontré l'an dernier un responsable du CEA, qui était déjà très inquiet des perspectives pour cet établissement et du regard que le Gouvernement semblait lui porter : en réalité, il avait raison d'avoir peur, car le couperet est tombé !
L'argument selon lequel il ne s'agit que de trésorerie pour ces établissements n'est pas pertinent : on sait bien que, pour les programmes de recherche, les décaissements ne se font pas régulièrement au fil de l'eau, chaque année, et qu'il s'agissait de financer des programmes de recherche spécifique. L'annulation de 114 millions d'euros de crédits pour le CEA et le CNRS me paraît excessive, alors que notre pays a besoin de renouer avec la compétitivité. On ne peut pas à la fois appeler, du matin au soir, à soutenir la compétitivité de notre économie et, dans le même temps, diminuer ainsi les moyens de l'enseignement supérieur et de la recherche, gages de compétitivité.
Enfin, je note que la purge se poursuit pour les collectivités territoriales. La mesure proposée peut, à première vue, paraître indolore, puisqu'il ne s'agit que d'annuler 11 millions d'euros en autorisations d'engagement, mais cela concerne aussi 21 millions d'euros en crédits de paiement, alors que les collectivités locales n'en peuvent plus. L'investissement local est déjà très fragilisé et le Gouvernement ne semble pas avoir pris la mesure de la gravité de la situation financière des collectivités territoriales.
J'apprécie toutefois l'approche critique de la rapporteure générale concernant les crédits de l'enseignement supérieur et de la recherche : il faut effectivement, sur ce sujet, « tirer la sonnette d'alarme ».